L'Autriche veut fortement limiter le nombre des réfugiés sur son sol, incarnant la détermination accrue des gouvernements européens à décourager les candidats à l'asile, toujours nombreux aux portes de l'UE.

L'annonce par la coalition centriste au pouvoir à Vienne d'un plafond annuel pour le nombre des demandeurs d'asile, à partir de 2016, fait craindre à la Commission européenne un effet domino dans les autres pays.

La Commission, qui tente de promouvoir une réponse coordonnée à la crise migratoire, semble prise de vitesse par la volonté des États d'agir seuls, avant la fin de l'hiver et une nouvelle accélération du flux migratoire.

Pays hors UE, la Macédoine a aussi pris la décision de fermer provisoirement mercredi sa frontière avec la Grèce, y bloquant plusieurs centaines de migrants.

L'Autriche souhaite également, dans les prochains jours, ne plus laisser entrer les migrants cherchant à gagner la Scandinavie, et les refouler à sa frontière, comme le fait déjà l'Allemagne depuis que la Suède et le Danemark ont restreint, début janvier, les entrées sur leur territoire.

Croatie et Serbie ont annoncé mercredi qu'elles feraient de même et ne laisseraient désormais passer que ceux demandant l'asile en Allemagne ou en Autriche, laissant présager de situations chaotiques parmi les migrants sur la route de l'exode.

«En Allemagne, on nous a dit qu'il y avait une nouvelle loi, qu'on ne pouvait pas rester ici et, le lendemain, on nous a renvoyés en Autriche», a témoigné auprès de l'AFP Hawre, un Iranien rencontré dans un camp d'accueil près de Salzbourg et qui souhaite se rendre aux Pays-Bas.

L'Allemagne, quant à elle, affirme encore tabler sur «une solution européenne commune», selon le porte-parole de la chancelière Steffen Seibert.

À ce titre, Berlin a annoncé mercredi le démantèlement d'un réseau de passeurs de migrants en Méditerranée, grâce à une opération commune germano-turque et des perquisitions dans les deux pays. Cinq suspects ont été arrêtés en Allemagne, trente en Turquie, accusés d'avoir fait traverser la Méditerranée à 1700 personnes.

Mais la défiance de l'opinion vis-à-vis de la politique d'ouverture aux migrants d'Angela Merkel a été alimentée par les violences du Nouvel An à Cologne, et la pression en faveur de mesures plus draconiennes est forte.

Les conservateurs bavarois ont profité de la décision de Vienne pour faire de nouveau entendre leur revendication d'un «plafond» de 200 000 migrants par an en Allemagne, où 1,1 million de demandes d'asile ont été enregistrées en 2015.

Le président allemand Joachim Gauck a estimé au forum de Davos que limiter l'afflux des demandeurs d'asile pouvait être «moralement et politiquement requis» en Europe, pour ne pas «laisser le champ libre aux populistes».

Le gouvernement autrichien a annoncé vouloir limiter à 37 500 le nombre de ceux qui seront accueillis en Autriche en 2016, plus de deux fois moins que les 90 000 de l'année dernière.

«Pression» sur l'UE 

Ces quatre prochaines années, Vienne souhaite au total limiter à 1,5% de la population autrichienne (8,5 millions d'habitants) le nombre des demandeurs d'asile supplémentaires dans ce pays, soit 127 500 personnes de 2016 à 2019.

Il s'agit aussi par cet objectif chiffré d'«exercer une pression» sur l'UE afin d'obtenir une accélération dans la mise en oeuvre de mesures pour stopper les migrants, selon les dirigeants autrichiens.

«Nous avons besoin d'une forte réduction (du nombre des arrivées de migrants dans l'UE, ndlr) dans les six à huit prochaines semaines», avant la fin de l'hiver, a également lancé le Premier ministre néerlandais Mark Rutte, dont le pays assure la présidence tournante de l'UE, aux eurodéputés réunis à Strasbourg.

Plus d'un million de migrants ont rallié le continent européen en 2015. Selon des estimations de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), 31 000 arrivées ont été enregistrées en Grèce depuis le début de l'année, soit 21 fois plus qu'en janvier 2015.

L'exécutif européen pourrait proposer en mars un nouvel outil de gestion du flux sous la forme d'une refonte du système dit de Dublin, bafoué depuis de nombreux mois.

Au lieu de faire traiter la demande d'asile par l'État membre où le migrant est entré dans l'UE, comme le prescrit la règle européenne, chaque État se verrait attribuer un quota permanent de réfugiés en fonction de sa taille, de son PIB, etc.

L'idée de la Commission est d'arriver à un système de «relocalisation» permanent, alors que le système défini en septembre ne porte que sur un nombre limité de 160 000 réfugiés.

Les températures sont désormais très basses tout au long de la route de l'exode et une fillette d'environ cinq ans ainsi qu'une femme sont mortes de froid mercredi en tentant d'atteindre l'île grecque de Lesbos au départ des côtes turques.