Ils ne cessent d'arriver en nombre et la Croatie n'a qu'un but, faire en sorte qu'ils quittent le plus vite possible son territoire. Dimanche, guidés par des policiers, un petit record a été établi: plus de 1200 migrants sont passés en moins d'une heure en Hongrie voisine.

Parti de Tovarnik, dans l'est de la Croatie, à la frontière avec la Serbie, le train composé de onze wagons est arrivé à Botovo, dans le nord-est de cette ex-république yougoslave, en début de soirée, après cinq heures de route, tout près de la frontière avec la Hongrie.

Zagreb a comptabilisé 25 000 entrées de migrants depuis mercredi et s'empresse de les renvoyer surtout vers la Hongrie, alors que le flot de réfugiés arrivant de Serbie, avec pour destination finale les pays riches d'Europe occidentale, est loin de diminuer.

À Botovo, une trentaine de policiers croates encadrent le train avant d'autoriser les migrants du Moyen-Orient - dont certain fuyant des zones de conflit en Syrie, Irak et Afghanistan - à descendre.

On leur indique en gesticulant d'emprunter une route goudronnée bordée à droite par un champ de maïs et à gauche par la voie ferrée.

«Ne laissez pas passer les journalistes», ordonne à ses homme le commandant du dispositif.

La marée humaine se met en branle. Un père porte sa fillette endormie dans les bras.

Zyad, un homme d'une trentaine d'années originaire de Damas, anime son groupe.

«Yalla shabab» (Allons-y, les gars), lance-t-il a une demi-douzaine de compagnons, dont un adolescent de 14 ans.

L'Allemagne, ce pays magnifique 

Le temps presse et les policiers croates jalonnant leur itinéraire les encouragent à ne pas s'arrêter.

«J'ai étudié le tourisme mais j'ai travaillé dans l'industrie du prêt-à-porter», raconte Zyad, T-shirt jaune et barbe rasée de près.

«Je faisais venir les collections les plus célèbres en Syrie», se vante souriant cet homme au teint olivâtre.

La colonne avance au pas rapide et traverse un pont enjambant la rivière de Drave.

Des policiers les orientent ensuite sur un sentier de terre traversant un champ.

«J'ai quitté mon pays il y a douze jours. Ce fut un périple terrible, à travers le Liban, la Turquie, la Grèce, la Macédoine, la Serbie, la Croatie», raconte-t-il alors qu'à l'horizon on aperçoit des lumières en territoire hongrois.

Au bout du sentier, en haut d'une colline, le groupe est accueilli par deux policiers hongrois se tenant des deux côtés du sentier.

«Je dois m'en aller maintenant», s'excuse Zyad, tout en voulant mentionner que ses deux enfants et son épouse attendaient à Damas qu'il s'installe pour les faire venir, eux aussi, en Allemagne.

«Nous voulons juste la paix et vivre en harmonie en Europe, moi et ma famille dans ce pays magnifique qui est l'Allemagne», lance-t-il.

Le millier de migrants n'a eu besoin que d'une cinquantaine de minutes pour parcourir à pied les deux kilomètres les conduisant de la gare de Botovo en Hongrie.

«C'est fini», lâche un policier croate avant de s'offusquer en découvrant les deux journalistes passés entre les mailles de son dispositif. «Allez-y», marmonne-t-il après avoir vérifié leur accréditation.