Les histoires déchirantes des migrants et des réfugiés syriens tentant d'atteindre l'Europe ont commencé à faire les manchettes seulement récemment, mais il y a longtemps que l'écrivain canadien Lawrence Hill s'intéresse au sort des déplacés.

La soeur de M. Hill, Karen, qui est aujourd'hui décédée, vivait à Berlin-Ouest dans les années 1980, époque où la ville comptait un grand nombre de réfugiés soudanais sans statut légal.

L'auteur du roman The Book of Negroes (Aminata en version française) se rappelle d'un ancien caricaturiste qui vendait des dessins pour une poignée de dollars, juste pour survivre.

Lawrence Hill, qui a remporté cette année le prix d'histoire du gouverneur général pour les médias populaires, aussi appelé prix Pierre-Berton, affirme avoir été fasciné de voir toute l'énergie et les habiletés que ces gens devaient déployer pour assurer leur survie.

L'existence des réfugiés et la passion du romancier pour la course à pied sont au coeur de son nouveau roman, The Illegal, sorti en librairie au début de septembre.

Le livre met en scène Keita Ali, un jeune homme vivant sur une île montagneuse dont la vie bascule lorsque son père Yoyo, un journaliste, se retrouve dans l'eau chaude pour avoir exprimé des opinions politiques contraires aux idées du parti au pouvoir.

Pris pour cible par les sbires du régime de sa terre natale, Keita se réfugie dans un pays riche où il tire parti de son incroyable talent de coureur pour survivre, courant à la fois pour gagner de l'argent et échapper à ses poursuivants.

The Illegal est raconté selon les points de vue des différents personnages. Chacun semble avoir un intérêt particulier à voir le héros réussir ou échouer, dont son agent Anton Hamm, le ministre de l'Immigration Rocco Calder et la reporter Viola Hill.

Autre protagoniste importante: la tenancière de bordel Lula DiStefano, la reine autoproclamée d'un bidonville qui abrite les réfugiés que le gouvernement souhaite déporter.

Lawrence Hill confie qu'il s'est inspiré des bidonvilles sud-africains qu'il a visités pour créer celui de son roman.

«Cette image d'un énorme bidonville aux limites d'une cité très riche est à la fois puissante et très troublante», indique l'homme de 58 ans.

«Pour vous rendre de l'aéroport au centre-ville de Cape Town, vous devez rouler sur une autoroute où, pendant des kilomètres et des kilomètres, tout ce que vous voyez est un bidonville s'étalant peut-être sur une dizaine de kilomètres, poursuit-il. Des dizaines de milliers de personnes vivent dans des cabanes en tôle ondulée, souvent sans électricité et sans eau courante. Au Canada, ces conditions de vie sont inimaginables, sauf dans certaines réserves autochtones isolées.»

M. Hill dit pouvoir établir un parallèle entre The Illegal et les difficultés vécues par ceux et celles qui essaient de s'intégrer à une nouvelle société.

«Le chemin parcouru par les réfugiés et les immigrants est souvent très solitaire, note-t-il. Heureusement, plusieurs d'entre eux travaillent fort et réussissent à surmonter cette solitude afin de refaire leur vie, mais c'est très difficile. C'était difficile il y a 100 et 50 ans, mais ce l'est encore aujourd'hui.»

The Illegal vient tout juste d'être publié, mais Lawrence Hill planche déjà sur son adaptation cinématographique en collaboration avec le réalisateur Clement Virgo, avec qui il transformé Aminata en télésérie coproduite par CBC et BET TV.