Montrés du doigt pour leur manque de réactivité face à la crise migratoire déclenchée par le conflit en Syrie, les États-Unis ont annoncé jeudi qu'ils allaient accueillir 10 000 réfugiés, un chiffre qui ne devrait cependant pas suffire à faire taire les critiques.

«Face à la crise des réfugiés syriens, le président Barack Obama a ordonné de monter en puissance», a expliqué son porte-parole, Josh Earnest, évoquant l'arrivée d'au moins 10 000 réfugiés syriens d'ici septembre 2016.

Depuis le déclenchement de la guerre civile au printemps 2011, les États-Unis ont accueilli quelque 1800 Syriens, selon l'exécutif. Pour la fin de l'exercice fiscal 2016, le département d'État avait initialement évoqué à chiffre allant de 5000 à 8000.

Contraste saisissant: à lui seul, le Québec s'est engagé à en recevoir 3650 d'ici décembre.

Depuis plusieurs jours, des voix se sont fait entendre dans les milieux diplomatiques et humanitaires pour critiquer la passivité de la première puissance mondiale, qui a une tradition historique d'accueil des réfugiés.

Le Haut-commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR) a recommandé auprès des autorités américaines quelque 17 000 dossiers de Syriens pour qu'ils soient éventuellement réinstallés aux États-Unis.

La crainte de l'arrivée de djihadistes ultra-radicaux par ce biais occupe une place centrale dans le débat politique américain.

L'élu républicain Michael McCaul, président de la Commission sur la sécurité nationale, a dénoncé jeudi en termes très vifs la décision présidentielle, lui demandant de consulter le Congrès au plus vite.

«Nous savons que l'organisation de l'État islamique (EI) veut utiliser la route des réfugiés pour envoyer des agents à l'ouest», a-t-il lancé. «Cela nous brise le coeur de voir des Syriens innocents fuir la violence dans leur pays (...), mais la meilleure façon de résoudre cette crise se trouve à la source», a-t-il ajouté, réclament une «véritable stratégie» pour vaincre l'EI et s'assurer que Bachar al-Assad quitte le pouvoir.

Manque de «leadership»

La Maison-Blanche assure de son côté que la sécurité du territoire américain est sa «priorité numéro un».

«Nous devons être sûrs que nous comprenons qui vient ici (...) parce qu'il y a un risque», a expliqué le directeur du FBI, James Comey.

«Je peux vous assurer que les réfugiés passent par un processus de sécurité le plus robuste qui soit», a aussi souligné Josh Earnest, évoquant les contrôles effectués par le Centre national de lutte contre le terrorisme et le FBI ou encore les entretiens individuels auxquels ils doivent se soumettre.

Le processus prend, en moyenne, entre 12 et 18 mois, a-t-il souligné. La lourdeur du processus administratif est régulièrement dénoncée par les organisations de défense des droits de l'homme.

Sur le plan diplomatique, le secrétaire d'Etat John Kerry multiplie depuis des semaines les consultations avec la Russie et l'Arabie saoudite afin de trouver une porte de sortie politique au conflit syrien qui a fait au moins 240.000 morts depuis mars 2011.

L'ONG Human Rights First a exprimé sa déception, dénonçant l'absence de «leadership» des États-Unis sur ce dossier. «Si cette administration veut être prise au sérieux par la communauté internationale, elle devrait démontrer sa détermination en engageant un effort majeur qui offrirait une protection à au moins 100c000 Syriens l'année prochaine», a-t-elle estimé.

«Le bilan des États-Unis lorsqu'il s'agit de répondre aux besoins humanitaires des personnes déplacées est solide», a martelé Josh Earnest, placé sur la défensive sur ce thème depuis plusieurs jours lors de son briefing quotidien.

«Personne ne traîne les pieds (...) Aucun pays n'accueille plus de réfugiés venus du monde entier que les États-Unis», a ajouté en écho John Kirby, porte-parole du département d'État.

Toutes nationalités confondues dans le monde, les autorités américaines affirment que 70 000 personnes trouvent refuge, légalement, chaque année sur leur sol.

Plus de quatre millions de Syriens ont fui leur pays depuis 2011.