La veille, Barack Obama avait tenu à terminer une ronde de golf et à assister à une réception offerte par un riche donateur de Martha's Vineyard, une île huppée de la Nouvelle-Angleterre, laissant à un porte-parole le soin de commenter le massacre du Caire au nom de la Maison-Blanche.

Hier, le président a interrompu ses vacances pour réagir pour la première fois en public à la répression sanglante des civils par l'armée. Après avoir condamné «avec force les mesures prises par le gouvernement intérimaire égyptien», il a annoncé l'annulation de manoeuvres militaires conjointes avec l'Égypte prévues le mois prochain.

«Si nous souhaitons maintenir notre relation avec l'Égypte, notre coopération habituelle ne peut continuer comme si de rien n'était lorsque des civils sont tués dans les rues et que les droits régressent» a dit le président.

Trop peu, trop tard, ont répondu les critiques de sa politique égyptienne.

«Je pense que l'administration évite de faire face aux vraies questions. Il est temps de suspendre l'aide financière à l'Égypte», a déclaré à La Presse Thomas Carothers, spécialiste de la politique étrangère des États-Unis au centre de réflexion Carnegie Endowment for International Peace.

«L'argument selon lequel nous ne voulons pas perdre notre influence auprès de l'armée égyptienne ne tient plus. Les militaires font ce qu'ils veulent», a-t-il ajouté.

Les pages éditoriales du New York Times et du Washington Post ont exprimé la même opinion hier. Le Post a même accusé l'administration Obama d'être «complice» des violences en Égypte.

Dans sa déclaration à Martha's Vineyard, le président Obama n'a pas exclu la possibilité de prendre des «mesures supplémentaires» contre le gouvernement intérimaire égyptien. Selon Thomas Carothers, il pourrait se résoudre «dans les prochains jours» à suspendre l'aide financière des États-Unis à l'Égypte, qui s'élève à 1,55 milliard de dollars par année, dont 1,3 milliard sont destinés à l'armée.

«Mais il aura l'air d'avoir été contraint par les événements», a précisé l'expert de la fondation Carnegie.

Les États-Unis ont refusé jusqu'ici d'employer les mots «coup d'État» pour parler de l'action qui a mené au renversement du président Mohamed Morsi par l'armée égyptienne. Une telle désignation aurait forcé l'administration américaine à suspendre son aide à l'Égypte.

Le président Obama n'a pas ménagé le gouvernement du président déchu, lui reprochant de ne pas avoir été «inclusif» et respectueux des «points de vue de tous les Égyptiens». Mais le gouvernement intérimaire n'est pas mieux, a-t-il précisé.

«Les Égyptiens méritent mieux que ce à quoi nous avons assisté ces derniers jours», a conclu M. Obama.