Les Français «blancs» sont-ils les victimes d'une flambée de racisme ignorée? Ou s'agit-il des élucubrations d'un politicien cherchant à jouer avec des thèses d'extrême droite pour favoriser son ascension?

Les deux théories s'affrontent depuis la sortie d'un ouvrage de Jean-François Copé, Manifeste pour une droite décomplexée, dans lequel le secrétaire général de l'Union pour un mouvement populaire (UMP), principal parti de la droite traditionnelle, évoque la problématique du «racisme anti-Blanc».

Le politicien relève dans des extraits diffusés par Le Figaro que «des individus - dont certains de nationalité française - méprisent des Français» dans certains quartiers en les qualifiant parfois de «Gaulois» parce qu'ils «n'ont pas la même religion, la même couleur de peau ou les mêmes origines qu'eux».

«Ce racisme-là est tout aussi inacceptable que toutes les autres formes de racisme», a souligné M. Copé, qui juge nécessaire de briser le «tabou» existant à ce sujet dans la société pour mettre au jour «la vérité que vivent certains [...] compatriotes». Le silence, dit-il, «ne fait qu'aggraver leurs traumatismes».

«C'est du Copé-coller», a ironisé la présidente du Front national, Marine Le Pen, après avoir pris connaissance de la sortie du politicien, qui aspire à représenter l'UMP au scrutin présidentiel de 2017.

«M. Copé a hurlé avec les loups quand le Front national, pendant des mois et des mois, a demandé qu'on prenne en compte le racisme anti-Blanc et anti-Français», a ironisé la politicienne, qui a évoqué la nécessité d'une loi à ce sujet au printemps dernier.

Selon elle, des milliers de Français se font traiter «tous les jours» de «sale Blanc» ou de «face de craie» sans susciter la moindre réprobation des autorités.

Plusieurs ténors de la gauche n'ont pas manqué de rappeler que la problématique évoquée par le secrétaire général de l'UMP renvoyait aux thèses de l'extrême droite.

«Copé hésite entre sosie de Sarkozy et perroquet de Marine Le Pen», a déclaré le nouveau premier secrétaire du Parti socialiste, Harlem Désir, qui soupçonne le politicien de préparer un rapprochement entre sa formation et le Front national.

Même analyse de SOS-Racisme, qui accuse M. Copé de se livrer à une «dangereuse tentative de siphonnage des voix les plus radicales». «Il tente aujourd'hui de nous faire croire que les premières victimes du racisme en France seraient finalement les Français de souche», souligne l'organisation, qui n'en croit pas un mot.

Même son de cloche de l'organisation antiraciste Egam, qui voit dans l'évocation du «racisme anti-Blanc» un stratagème de l'extrême droite destiné à «inverser la victimisation» sans tenir compte de la réalité.

Le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, après avoir été interpellé à ce sujet à l'Assemblée nationale au début de la semaine, a souligné que le gouvernement entendait lutter contre le racisme sous toutes ses formes sans créer de distinction.

«La loi est la même pour tous et ne distinguera jamais les victimes du racisme», a-t-il déclaré.

À défaut de séduire la gauche, la thèse avancée par Jean-François Copé trouve un écho dans la population puisque 56% des personnes interrogées dans le cadre d'un sondage de la firme TNS-Sofres se disent convaincus que le «racisme anti-Blanc» se développe dans les quartiers sensibles des grandes villes. Parmi les sympathisants de droite, 84% des répondants en disent autant.

Une étude produite par l'Institut national d'études démographiques en 2009 indiquait que 18% des «natifs» - les Français nés en France de parents français - se plaignaient d'avoir souffert de «racisme», principalement sous forme d'insultes. Chez les descendants d'immigrants maghrébins, le taux correspondant était de 50%.