Deux soeurs emprisonnées depuis 16 ans au Mississippi ont été libérées hier, à la condition que l'une donne l'un de ses reins à l'autre, qui souffre d'une maladie rénale.

«Nous sommes bénies, totalement bénies, a dit Gladys Scott lors d'un point de presse, hier. C'était une longue route difficile, mais nous y sommes parvenues.»

Jamie et Gladys Scott, âgées respectivement de 36 et 38 ans, avaient été condamnées à la prison à vie en 1994 pour avoir participé à un vol à main armée qui leur aurait rapporté 11$.

Un mouvement populaire pour la libération des soeurs a fait connaître leur cause au Mississippi ces derniers mois. Leur avocat, Chokwe Lumumba, a précisé que leur mise en liberté ne signifiait pas la fin de leurs problèmes. «Jamie Scott a un urgent besoin d'une transplantation, elle est au degré 5, ce qui est le plus haut degré des problèmes de reins», a-t-il dit à CNN.

Selon M. Lumumba, les médecins devront faire des tests pour voir si la patiente et la donneuse potentielle sont compatibles. «Le bureau du gouverneur m'a assuré que les soeurs ne seraient pas renvoyées en prison si les médecins déterminent que la transplantation est impossible. On ne peut pas punir quelqu'un parce qu'il ne peut donner un organe.»

La dialyse de la prisonnière coûtait cher à l'État...

Le gouverneur du Mississippi, Haley Barbour, a dit avoir décidé d'accorder une remise de peine aux deux femmes parce que le traitement de Jamie Scott coûtait 200 000$ annuellement à l'État. Mme Scott devait se soumettre à la dialyse trois fois par semaine.

La Société américaine des transplantations a critiqué la façon dont le dossier a été mené. Pour sa présidente, Maryl R. Johnson, «la décision de donner un organe devrait être prise sans autre considération que celle d'aider une personne malade».

Lourde peine

Les soeurs Scott, qui sont afro-américaines, ont reçu l'appui de l'Association nationale pour l'avancement des personnes de couleur (NAACP), qui déplore qu'elles aient été condamnées à la prison à perpétuité pour le vol d'une si petite somme d'argent.

«Nous venons de rayer un dossier de notre liste, a déclaré le président de la NAACP, Benjamin Jealous. Nous n'avons pas fini de nous battre pour réparer les injustices.»

Le vol en question est survenu au Mississippi en 1993, à la veille de Noël. Les soeurs Scott ont été accusées d'avoir attiré deux hommes dans un guet-apens, où ils ont été dévalisés à la pointe du fusil par trois adolescents. Ceux-ci ont purgé des peines légères et ont depuis longtemps été libérés.

Les soeurs Scott, qui ont toujours clamé leur innocence, comptent aujourd'hui emménager à Pensacola, dans le nord-ouest de la Floride, où habite leur mère. Elles ont trois enfants à elles deux.

«Nous ne sommes pas amères envers eux (les adolescents qui ont fait le vol), a dit Gladys Scott, hier. Nous n'aurions pas pu survivre en prison durant 16 ans si nous étions des personnes amères. Ça n'aurait pas fonctionné. Nous serions anéanties.»

Durant le point de presse, Jamie Scott a dit ne pas réaliser encore qu'elle venait d'être libérée.

«Je ne croyais pas que ce jour allait arriver. Je ne voyais pas le jour où je me trouverais à l'extérieur des murs.»