Stephen Harper n'a pas droit à un hommage aussi vibrant que Tony Blair dans les mémoires de George W. Bush, mais il y reçoit quand même un titre dont l'ancien président américain se montre avare en évoquant ses relations avec les dirigeants étrangers, celui d'«ami».

L'auteur de Decision Points (Instants décisifs) mentionne le premier ministre canadien à deux reprises dans son ouvrage de 497 pages paru hier aux États-Unis. La première fois, pour saluer la décision de Stephen Harper en 2006 d'augmenter les effectifs canadiens en Afghanistan et d'y prolonger leur mission. Et la deuxième fois, pour rappeler une blague de son «ami» du Nord à propos de Vladimir Poutine, un homme «parfois hautain, parfois charmant, toujours dur», qui se serait un jour vanté, en présence du président américain, d'avoir un plus gros chien que le sien.

«Heureusement qu'il ne t'a montré que son chien», aurait dit Stephen Harper après avoir entendu George W. Bush lui raconter la vantardise du Russe.

À en juger par Decision Points, Jean Chrétien ne semble cependant pas avoir été un des dirigeants préférés de l'auteur. Certes, l'ancien président exprime de la reconnaissance en rappelant l'appel téléphonique de l'ex-premier ministre après les attentats du 11 septembre 2001. «Nous sommes là», lui aurait simplement dit le chef du gouvernement canadien.

Chrétien au G8

Mais George W. Bush donne à Jean Chrétien un rôle moins sympathique ou coopératif dans les deux autres épisodes où il mentionne l'ancien premier ministre. Il se souvient que ce dernier, à titre d'hôte d'un sommet du G8, avait tenté de le dissuader de répondre à Jacques Chirac, qui venait de l'accuser d'«unilatéralisme» en raison de la nouvelle politique de Washington liant l'aide américaine au développement à la lutte contre la corruption.

«À la fin du sermon, je levai la main», écrit le 43e président. «Chrétien hocha la tête de droite à gauche. Il voulait donner la chance à d'autres dirigeants de s'exprimer. Mais je ne pouvais pas laisser passer la déclaration de Chirac.»

Et le président des États-Unis n'attendit pas le feu vert de l'hôte du G8 pour reprendre la parole.

George W. Bush se souvient également que Jean Chrétien faisait partie des dirigeants internationaux qui avaient «clairement désapprouvé» son discours déclarant Yasser Arafat inapte à gouverner et appelant «les Palestiniens à élire de nouveaux dirigeants qui ne soient pas compromis dans le terrorisme».

Decision Points se veut une méditation sur les décisions les plus importantes de George W. Bush, dont celles de dire adieu à l'alcool et d'envahir l'Irak. Il va sans dire que l'appui de Tony Blair dans le dossier irakien a contribué au fait que l'ancien président américain a noué avec lui «l'amitié la plus proche» qu'il a eue avec un dirigeant étranger.

George W. Bush se souvient d'avoir «entendu l'écho de Winston Churchill dans la voix de (son) ami» lorsque Tony Blair a bravé l'opinion de son propre parti sur la guerre d'Irak au risque de précipiter la chute de son gouvernement.

«Ce moment de courage restera toujours avec moi», écrit l'ancien président américain dans ses mémoires.