La meilleure façon de prendre la mesure des dégâts causés par les inondations de 2005 est de louer une voiture, glisser un CD dans le lecteur et de suivre la voix de Pamela Pipes.

«À votre gauche se trouve le 701, Andry Street, dit Mme Pipes, avec une intonation douce. Trois équipes de secouristes ont visité la maison durant l'inondation. La troisième équipe a trouvé trois corps au grenier. Cette maison est aujourd'hui abandonnée.»

Plus loin, Mme Pipes raconte comment le musicien Fats Domino a été secouru du balcon du second étage de sa petite maison jaune par une chaloupe pilotée par des secouristes. «Ses voisins n'ont pas vu arriver les secours. Tout le monde croyait qu'il était mort. Des gens ont écrit R.I.P sur sa maison.»

Née dans une famille établie à La Nouvelle-Orléans depuis sept générations, Pamela Pipes a été l'une des premières citoyennes à regagner sa maison après la fin des inondations, en octobre 2005.

Dès la première nuit, Mme Pipes, qui avait une entreprise dans l'industrie touristique avant Katrina, a eu une idée: enregistrer un CD pour guider les visiteurs dans les ruines de la ville.

«Il n'y avait pas d'électricité, pas d'eau courante, pas de gaz, pas de téléphone, dit-elle. Plus de 1600 personnes venaient de perdre la vie. Je voulais raconter leur histoire, leur donner une voix. C'est devenu une mission pour moi. Je ne dormais plus. Je ne mangeais plus.»

Mme Pipes a finalement lancé son CD en 2007. Des citoyens de la ville y font la narration et décrivent ce qu'ils ont vécu. Une carte qui l'accompagne propose un itinéraire qui montre aux visiteurs les zones sinistrées, les digues qui ont cédé, mais aussi les quartiers en reconstruction.

Le tour autoguidé a vite fait parler de lui. En 2008, Mme Pipes a été en nomination pour un prix Audie, remis à Los Angeles aux auteurs des meilleurs livres audio de l'année.

«Ça m'a fait réaliser que tout est possible, il n'y a pas de limites», dit-elle.

Au moment du lancement du CD, Mme Pipes a réalisé qu'un détail manquait: bien des panneaux indiquant le nom des rues avaient été emportés par le courant, et personne n'avait songé à les remplacer.

«Je suis allée faire fabriquer des affichettes en métal et je suis allée les poser, dit-elle. La ville m'a dit que c'était illégal, mais je m'en balance. Encore aujourd'hui, certaines affichettes sont là.»

Sur le Net: www.toursbayou.com