Comme prévu, les opposants au mariage homosexuel en Californie ont interjeté appel hier de la décision d'un juge fédéral de déclarer «anticonstitutionnelle» l'interdiction des unions entre personnes du même sexe.

Et tandis que les partisans du mariage gai célébraient une étape importante «sur la route de l'égalité et de la liberté pour tous», pour reprendre les mots du gouverneur républicain de Californie Arnold Schwarzenegger, des commentateurs et des groupes conservateurs ont critiqué la décision du juge Vaughn Walker, de la cour fédérale de San Francisco, en soulevant la question de son orientation sexuelle.

«Il est également extrêmement problématique que le juge Walker soit lui-même un homosexuel pratiquant», a déclaré Tim Wildmon, président de l'American Family Association. «Il aurait dû se récuser, car son jugement est clairement compromis par sa propre orientation sexuelle.»

«Un type blanc d'un certain âge a rendu une décision, et il se trouve qu'il est gai. Cela a dû avoir un impact sur sa décision», a déclaré de son côté sur MSNBC Pat Buchanan, ex-candidat à la Maison-Blanche.

La décision du juge Walker est intervenue huit mois après le début d'un procès dans lequel les plaignantes, un couple de lesbiennes, contestaient la «Proposition 8» adoptée par référendum le 4 novembre 2008. Celle-ci avait permis de stipuler dans la Constitution californienne que «seul le mariage entre un homme et une femme est valide et reconnu».

Dans une décision de 136 pages rendue mercredi, le juge fédéral a estimé que «la Proposition 8 échoue à établir une quelconque base rationnelle à l'interdiction du mariage pour les gais et lesbiennes».

«En fait, la Proposition 8 revient à inscrire dans la Constitution que les couples de sexe opposé sont supérieurs à ceux de même sexe», a-t-il ajouté.

L'ironie veut que le juge Walker doive sa position à Ronald Reagan, un des présidents les plus conservateurs de l'histoire américaine. Qui plus est, nombre de démocrates progressistes, dont le sénateur Edward Kennedy et la présidente actuelle de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, s'étaient opposés à sa nomination, en critiquant notamment sa feuille de route au chapitre des droits des homosexuels.

Vers la Cour suprême

La décision du juge fédéral n'est qu'une étape dans une affaire qui devrait aboutir devant la Cour suprême des États-Unis, selon la plupart des experts. En attendant, son impact politique est incertain.

La Maison-Blanche a maintenu hier sa position ambiguë, voire contradictoire, dans ce dossier: Barack Obama s'oppose à la fois au mariage entre personnes du même sexe et à la Proposition 8, jugeant que le référendum californien n'a servi qu'à diviser la population et à stigmatiser les homosexuels.

Le président est cependant en faveur de l'égalité pour les couples de gais et de lesbiennes face à l'appareil gouvernemental fédéral.

Le juge Walker doit décider aujourd'hui s'il suspendra sa décision ou s'il permettra aux gais et lesbiennes de se marier de nouveau en Californie, comme ceux-ci peuvent le faire dans cinq États - Connecticut, Iowa, Massachusetts, New Hampshire et Vermont - ainsi que dans le District de Columbia.