Lorsqu'elle travaille, Lamis Zein oublie tout le reste. Elle se concentre sur une chose: débarrasser le sol libanais des sous-munitions qui menacent d'exploser à tout moment.

«Je n'ai pas peur. C'est une grosse responsabilité, mais j'aime ce que je fais», dit la femme de 32 ans.

Lamis Zein est superviseure d'une équipe composée uniquement de femmes civiles. Mère de deux fillettes de 3 et 6 ans, elle enseignait l'anglais à Tyr, dans le sud du Liban, lorsqu'elle a vu l'offre d'emploi de la Norwegian People's Aid, il y a deux ans.

 

L'organisme, qui s'occupe notamment d'aider les victimes et de nettoyer les terres des sous-munitions, a ouvert des postes destinés aux femmes dans un souci d'égalité des sexes. La réponse, dans une population pauvre et éprouvée par les conflits, ne s'est pas fait attendre.

«Nous avons été surpris. En une semaine, nous avons reçu plus de 50 applications», relate Khaled Yamout, coordonnateur du programme d'action contre les mines de la NPA.

L'arrivée d'une équipe toute féminine a été bien accueillie par la population, à forte majorité musulmane, dit Mme Zein, qui porte elle-même le hijab.

La moitié de l'équipe de 12 personnes est composée de mères de famille. «C'est sûr qu'on pense à nos enfants. On sait que c'est dangereux. Mais c'est aussi pour sauver des enfants qu'on le fait», souligne Mme Zein, qui travaille à Al-Tiri, près de Nabatiyé.

En tout, 30 équipes sont en opération dans différentes régions du sud du pays.

Non loin d'Al-Tiri, à Homin el Fawqa, d'autres chercheurs sont au boulot dans un territoire encerclé de fils barbelés. Une pancarte rouge avec une tête de mort émet un avertissement: danger mines.

Casque sur la tête, visière rabattue sur le visage, uniforme de protection sur le corps, l'équipe cherche des explosifs. L'un d'eux lève la main. C'est le signal: le détecteur a trouvé une munition. Le superviseur éloigne l'équipe. Des sacs de sable sont placés autour de l'engin. On le fait exploser.

Des scènes comme celle-là, le sergent Ali, qui préfère taire son nom de famille, en vit régulièrement. Le jeune homme est spécialiste en explosifs depuis 10 ans.

«Je ne trouve pas ça stressant. On s'habitue», dit-il.

Le Lebanese Mine Action Center (LMAC), organe de l'armée libanaise, coordonne les activités en lien avec les mines et les sous-munitions. C'est lui qui chapeaute les programmes de «nettoyage» des sols, d'éducation de la population, d'assistance aux victimes. Plusieurs organismes non gouvernementaux travaillent de concert avec le LMAC.

Il y a moins de deux semaines, Lamis Zein est devenue la première femme accréditée par l'armée libanaise pour procéder à la démolition des explosifs trouvés. Très fière de son nouveau titre, Mme Zein rêve de travailler à l'étranger, dans d'autres pays ravagés par la guerre.

Quand le Liban sera complètement débarrassé de ses engins explosifs, précise-t-elle.

 

Les sous-munitions ailleurs dans le monde

Il y aurait plus d'une trentaine de pays et territoires pollués par les sous-munitions.

Laos

260 millions de sous-munitions larguées, dont de 13 à 78 millions n'ont pas explosé à l'impact.

Vietnam

96,9 millions de sous-munitions larguées, dont 4,9 à 29,1 millions n'ont pas explosé à l'impact.

Irak

50 millions de sous-munitions larguées, dont 2,6 à 6 millions n'ont pas explosé à l'impact.

Cambodge

26 millions de sous-munitions larguées, dont 1,3 à 7,8 millions n'ont pas explosé à l'impact.

Source: Handicap international

 

Un traité qui ne fait pas l'unanimité

La Convention sur les armes à sous-munitions entrera en vigueur le 1er août. Ce traité, ratifié par 32 pays, interdit l'utilisation, la production et le transfert de ces armes. Quelque 106 pays, dont le Liban et le Canada, l'ont signé, mais ne l'ont pas ratifié. Les États-Unis et Israël ont refusé de se joindre à l'entente.