À 16 ans, Djennet Abdourakhmanova a rencontré son mari sur l'internet. Un an plus tard, lundi dernier, elle s'est fait exploser dans le métro de Moscou pour venger la mort de ce dernier, tuant ainsi une vingtaine de civils.

Si elle n'était pas originaire du Caucase du Nord, le sort de Djennet Abdourakhmanova pourrait surprendre. Après tout, comme toutes les petites filles, il y a quelques années encore, elle lisait des poèmes en l'honneur de sa mère à l'école.Mais la violence qui enflamme sa république natale du Daguestan a fini par la rattraper. À 17 ans, son nom s'est ajouté à la longue liste des «veuves noires», ces femmes de combattants rebelles du Caucase qui ont choisi l'attentat suicide pour venger la mort de leur mari.

Depuis 1999, des dizaines de femmes, principalement tchétchènes, sont devenues kamikazes en Russie. Elles se sont fait exploser dans le métro moscovite, dans des avions, à des concerts rock, près de commissariats de police. En 2002, elles étaient 19, ceinturées d'explosifs, à participer à la prise d'otages dans le théâtre de la Doubrovka à Moscou qui a fait 130 morts parmi les spectateurs.

Pour Djennet Abdourak-hmanova, tout est allé très vite. Selon le quotidien Kommersant, après qu'il l'eut rencontrée sur l'internet, Oumalat Magomedov l'aurait forcée à devenir sa femme. Sur des photos transmises hier par la police, on voit le couple enlacé, l'air complice, manier des pistolets et des grenades.

C'était avant qu'Oumalat Magomedov, surnommé l'Émir du Daguestan, meure le 31 décembre dernier, lors d'un échange de tirs avec la police à Khassaviourt, dans l'ouest du Daguestan.

Ensuite, toujours selon Kommersant, Djennet aurait été convaincue de se sacrifier par des «idéologues wahhabites» liés aux combattants rebelles.

Hier après-midi, le Comité antiterroriste de Russie a confirmé que Djennet Abdourakhmanova était bien la kamikaze du métro Loubianka, où se trouve le siège des services de sécurité russe (FSB).

 

Deuxième non identifiée

L'identité de la deuxième kamikaze n'a toutefois pas encore été révélée. Les enquêteurs ont nié qu'il s'agissait de la femme d'un leader rebelle tchétchène tué récemment, comme l'ont laissé entendre les médias russes hier.

Interrogé par le Moscow Times, un étudiant en médecine malaisien blessé légèrement lors du deuxième attentat à la station Park Koultoury a raconté que la femme non identifiée était vêtue d'un ample manteau violet et «ne portait pas de voile. Ses yeux étaient grands ouverts, comme si elle était droguée, et ils clignaient à peine. C'était effrayant», relate Sim Eih Xing, 23 ans, qui a quitté le wagon juste avant l'explosion.

Sur les photos avec son mari, Djennet Abdourakhmanova porte une tenue noire et un voile qui ne laisse paraître que son visage. Les kamikazes auraient donc laissé tomber la stricte tenue islamique avant de commettre leurs attaques suicide, qui ont fait au total 40 morts et plus de 80 blessés.

Hier, les autorités ont diffusé la capture d'écran d'une vidéo de surveillance du métro montrant un homme au long nez, portant un béret, soupçonné d'avoir aidé les kamikazes. Deux autres présumées complices, des femmes slaves, sont aussi recherchées.

Alors que plusieurs députés exigent le retour de la peine de mort pour les terroristes, abolie il y a quelques mois, le président Dmitri Medvedev a rejeté cette option. Le juriste de formation a plutôt réitéré son souhait de voir les responsables des attentats éliminés, appelant implicitement à leur assassinat extrajudiciaire.