Aucun meurtre n'a ébranlé l'Angleterre contemporaine comme celui de James Bulger, enfant de 2 ans, en 1993. Les deux assassins étaient âgés de 10 ans. L'un d'eux, libéré en 2001, vient de retourner derrière les barreaux. Le mutisme du gouvernement sur sa réincarcération ne fait qu'alimenter les rumeurs. Et le désespoir de la mère de James Bulger.

«J'ai toujours su qu'ils allaient récidiver. Ils sont diaboliques.» Denise Fergus, mère du petit James Bulger, battu à mort en 1993, est sens dessus dessous depuis qu'un des deux assassins de son fils, Jon Venables, est retourné en prison pour n'avoir pas respecté les conditions de sa liberté conditionnelle.

 

Elle exige des réponses du gouvernement. Toutefois, elle se heurte à un mur de silence. Encore hier, le ministre de la Justice, Jack Straw, a affirmé qu'après mûre réflexion, il ne pouvait expliquer pourquoi Jon Venables a été réincarcéré le 24 février dernier. Cela porterait préjudice à la justice, a-t-il maintenu.

Depuis, les rumeurs et les «révélations» vont bon train dans les médias.

Le suspect possédait des images de violence sexuelle envers des enfants, assure le tabloïd The Sun. La presse britannique rapporte également que Jon Venables, qui vit sous une nouvelle identité, a des problèmes d'alcoolisme et de toxicomanie. Sa santé mentale serait fragile.

Battu à mort

Ce nouvel épisode dans l'affaire du meurtre de James Bulger réveille de douloureux souvenirs pour les Britanniques.

Le 12 février 1993, Jon Venables et Robert Thompson se promènent dans un centre commercial de Liverpool avec de noirs desseins en tête. Ils remarquent James Bulger. Le garçon s'était éloigné momentanément de sa mère.

Ils gagnent sa confiance et l'emmènent jusqu'à un chemin de fer. L'image d'un des tueurs prenant le petit garçon par la main, captée par une caméra de surveillance, restera figée dans la mémoire collective du pays.

Malgré 38 témoins, qui voient Venables et Thompson pousser et frapper James Bulger sur le chemin de sa mort, personne n'intervient. Les deux garçons finissent par le battre à coups de brique et de barre de fer et l'abandonnent sur la voie ferrée. Le petit corps sectionné sera retrouvé deux jours plus tard.

Pour apaiser la fureur publique, les enfants sont jugés comme des adultes. À 11 ans, ils deviennent les plus jeunes tueurs punis par la justice britannique. «Comment vous sentez-vous maintenant, petits salauds?» demande le Daily Star le jour de leur sentence.

Ils ont été libérés en 2001, sous conditions et avec une nouvelle identité.

Le droit de savoir

Malgré la pression populaire, le gouvernement refuse de divulguer des informations sur Jon Venables et le crime qui lui est reproché. Le débat sur son droit à un procès équitable par opposition à l'intérêt public à connaître sa nouvelle identité a enflammé les tribunes hier.

«Nous ne voulons pas être dans une situation où un juge rejette les accusations contre Venables parce qu'il ne peut pas avoir un procès équitable, a expliqué la ministre et présidente de la Chambre des communes, Harriet Harman, à Sky News hier. Les spéculations n'aident personne. Si un crime a été commis, le suspect doit faire face à la justice.»

Des actes de vengeance sont également redoutés.

Denise Fergus soutient toutefois que, maintenant que Venables a enfreint la loi à l'âge adulte, son identité ne devrait plus être protégée.

«J'en ai assez qu'on me ferme la porte au nez. Étant la mère de Jamie, j'ai le droit de savoir qui est cette personne et ce qu'elle a fait», a-t-elle dit à la chaîne ITV1.