La vague de colère soulevée par l'attribution de 165 millions en primes aux dirigeants d'AIG a poussé hier le Congrès américain à voter une taxe spéciale qui permet au gouvernement américain de récupérer la quasi-totalité des sommes versées.

Les primes seront imposées à 90%, une mesure prise pour calmer la grogne populaire, qui menace de paralyser les efforts entrepris par la Maison-Blanche pour aider les entreprises jugées essentielles à la survie du système économique.

 

«Les gens ont dit «non», a scandé le représentant démocrate du Dakota-du-Nord, Earl Pomeroy, en Chambre après le vote. En fait, les gens ont dit «bordel, non!».»

Il a ajouté, en parlant des dirigeants d'AIG: «Vous êtes des perdants professionnels sans aucune crédibilité. Rendez-nous notre argent.» La totalité des démocrates de la Chambre ont voté en faveur de la résolution, alors que le vote républicain était partagé.

La Maison-Blanche a publié un communiqué stipulant que le vote «traduit bien la colère que les citoyens ressentent face à ces primes. En fin de compte, cela est le symptôme d'un problème plus important: l'explosion d'une bulle qui a récompensé la spéculation irresponsable. C'est ce que nous devons réparer.»

Au même moment, des milliers d'Américains ont manifesté devant les bureaux d'AIG à Washington, New York, Miami et Los Angeles, réclamant la fin de «l'avidité des entreprises» et appelant les dirigeants d'AIG à démissionner.

Pour Jamie Leland, membre du mouvement progressiste MoveOn.org à Los Angeles, le but des manifestations est de rappeler aux géants déchus de la haute finance qu'ils doivent désormais rendre des comptes à la population.

«Leur avarice a mené l'économie mondiale au bord du précipice. Aujourd'hui, leur expérience a pris fin, et ce sont les contribuables qui les gardent en vie. Ils doivent comprendre que le monde a changé. Ce ne sont plus eux qui dictent les règles», a-t-il dit.

La Maison-Blanche déconnectée?

La fureur entourant les primes d'AIG ne semble pas perturber la Maison-Blanche. Le conseiller spécial du président, David Axelrod, a minimisé l'affaire, hier, en affirmant que «les gens ne s'assoient pas à leur table de cuisine pour parler d'AIG. Ils ont peur pour leur propre emploi.»

Pourtant, un sondage Gallup dévoilé hier montre que 88% des Américains sont «troublés» par les primes d'AIG, et disent suivre l'histoire de près.

De passage à Los Angeles, le président Barack Obama ne s'est pas attardé sur le scandale d'AIG, mais a cherché à donner de l'espoir aux gens venus l'entendre.

«Je ne peux vous dire si nous allons nous sortir du marasme économique dans quelques mois ou quelques années, mais je peux vous dire que nous allons en sortir plus forts que jamais», a dit le président, chaudement applaudi.

Barack Obama est apparu devant un auditoire d'un millier de personnes en compagnie d'Arnold Schwarzenegger, l'un des rares républicains à appuyer publiquement ses politiques.

Après son discours, le président s'est rendu à Burbank, au nord de Los Angeles, pour y enregistrer une émission du Tonight Show, animé par Jay Leno.

Le passage du président à l'émission de variétés a été dénoncé hier, par les républicains, qui accusent Obama de se laisser distraire alors que l'économie est en péril.

Le stratège démocrate Dan Gerstein a dit ne pas voir d'inconvénient à ce qu'Obama rende visite à Leno. «Je crois qu'il tente de projeter un air de normalité, de rassurer les gens qui travaillent fort, de dire qu'il ne faut pas paniquer. Dans la mesure où il ne fait pas quelque chose de déplacé, cela va être bien reçu.»

Le président risque de devoir aborder la question d'AIG sur le plateau de Leno.

L'animateur fait régulièrement des blagues sur les banques et l'économie. L'une des plus récentes: «L'économie va si mal que, l'autre jour, des voleurs sont entrés dans une banque et ont demandé le chemin pour le dépanneur le plus près.»