Meng Hongwei, le président d'Interpol, qui n'avait pas donné de ses nouvelles depuis plusieurs jours, a remis sa démission, a annoncé dimanche l'agence policière internationale.

Cette démission est effective dès maintenant, a ajouté Interpol, sur son site internet.

En vertu des règles de l'agence, l'actuel vice-président principal, le Sud-Coréen Kim Jong Yang occupera les fonctions de président intérimaire. Le prochain président sera élu à l'occasion de l'assemblée générale d'Interpol qui se déroulera le 21 novembre à Dubaï, dans les Émirats arabes unis.

Moins d'une heure après une conférence de presse au cours de laquelle la femme de M. Meng avait exprimé des inquiétudes sur son sort, la Chine a annoncé que M. Meng faisait l'objet d'une enquête pour des infractions non précisées. Faisant de ce vice-ministre de la Sécurité publique de Chine et chef d'Interpol le dernier haut responsable du pays à être emporté par la répression du gouvernement.

L'organe disciplinaire du Parti communiste au pouvoir en Chine a déclaré dans un communiqué publié sur son site internet que Meng Hongwei était «soupçonné de violer la loi et qu'il est actuellement sous surveillance et fait l'objet d'une enquête» par la Commission de surveillance nationale, nouvel organe chinois anticorruption.

Cette déclaration était la première information officielle au sujet du sort réservé à M. Meng, âgé de 64 ans.

L'image d'un couteau

Plus tôt aujourd'hui, Grace Meng avait révélé qu'elle avait reçu une image d'un couteau de son mari tout juste avant sa disparition en Chine, ce qui, selon elle, était sa façon de l'informer qu'il était en danger.

Mme Meng a raconté en détail aux médias, dimanche à Lyon, où se trouvent les bureaux d'Interpol, le dernier échange de messages effrayant qu'elle a eu avec son mari, Meng Hongwei.

Elle a affirmé ne pas avoir eu de ses nouvelles depuis le 25 septembre. Ce jour-là, il lui a envoyé l'image du couteau à l'aide de son téléphone fourni par Interpol, quatre minutes après avoir écrit un message disant: «Attends mon appel».

Elle dit n'avoir jamais reçu d'appel et n'avoir aucune idée de ce qui lui est arrivé.

Au sujet de l'image du couteau, elle a indiqué: «Je crois qu'il veut dire qu'il est en danger». Elle a confirmé qu'il était en Chine quand il a envoyé ce message.

«C'est le tout dernier message de mon mari, a-t-elle poursuivi. Après cela, je n'ai reçu aucun appel et il a disparu.»

Mme Meng a été accompagnée à l'hôtel où elle a tenu sa conférence de presse par deux policiers français chargés de sa sécurité.

Elle a dit ne pas vouloir spéculer sur l'endroit où son mari pourrait se trouver. Celui-ci voyageait fréquemment entre Lyon et la Chine pour son travail. Il avait effectué une tournée en Norvège, en Suède et en Serbie pour Interpol avant son dernier voyage en Chine, a-t-elle précisé.

Avant de recevoir l'image du couteau, elle a raconté lui avoir envoyé une photo de deux figurines d'animaux représentant un cheval et un ours pour symboliser leurs deux enfants. L'un adore les chevaux et l'autre «ressemble à l'ours», a dit Mme Meng.

Selon son témoignage, le couple était en communication quotidiennement jusqu'à la disparition de M. Meng.

Craignant pour sa propre sécurité et celle de ses enfants, la dame n'a pas autorisé les médias à montrer son visage. Sa voix tremblait d'émotion alors qu'elle lisait une déclaration écrite.

«À partir de maintenant, je suis passée du chagrin et de la peur à la recherche de la vérité, de la justice et de la responsabilité envers l'histoire, a-t-elle déclaré. Pour le mari que j'aime profondément, pour mes jeunes enfants, pour les gens de mon pays, pour que les maris de toutes les épouses et que les pères de tous les enfants cessent de disparaître.»

L'appel de Mme Meng pour la justice et l'équité fait écho aux plaidoyers des familles de nombreuses personnes qui sont tombées dans les mauvaises grâces du Parti communiste chinois sous le régime du président Xi Jinping. Certains d'entre eux ont peut-être même été poursuivis par les autorités chinoises sous la supervision de Meng Hongwei.

Ces victimes, qui ont fait l'objet de détentions arbitraires et de disparitions inexpliquées, comprennent des militants pour la démocratie, des avocats défenseurs des droits de la personne, des fonctionnaires accusés de corruption ou de manque de loyauté politique et environ un million de musulmans appartenant à une minorité ethnique qui ont disparu dans des camps d'internement dans l'ouest du pays.