La Chine a développé les capacités de son armée de l'air et s'entraîne «probablement» à viser des cibles américaines dans le Pacifique, y compris le territoire de Guam, selon un rapport du Pentagone sur les capacités militaires chinoises publié jeudi.

Au cours des trois dernières années, l'armée chinoise «a rapidement étendu les zones d'action de ses bombardiers (...) s'entraînant probablement à frapper des cibles américaines ou alliées», indique ce rapport annuel du ministère américain de la Défense destiné aux élus du Congrès.

L'an dernier, pour la première fois, des bombardiers chinois H-6K sont passés à proximité de l'île japonaise d'Okinawa (sud-ouest de l'archipel), qui accueille plus de la moitié des 47 000 soldats américains stationnés au Japon, ajoute le document.

Pékin «pourrait continuer à étendre son champ d'action au-delà de la première chaîne d'îles, et démontrer sa capacité à frapper des forces américaines et alliées dans l'océan Pacifique, y compris à Guam», territoire américain situé à plusieurs milliers de kilomètres des côtes chinoises et où sont stationnés quelque 7000 soldats américains.

La première chaîne d'îles autour de la Chine, que Pékin considère comme sa zone d'opérations, comprend le Japon et ses archipels du Nord et du Sud, la Corée du Sud, Taïwan et les Philippines.

Le rapport note que la Chine n'a pas revendiqué de nouveau territoire en mer de Chine méridionale en 2017, mais a continué à développer ses infrastructures militaires sur les îles disputées qu'elle occupe, notamment l'archipel Paracel et plusieurs îlots et récifs de l'archipel des Spratley.

Possible occupation de Taïwan

Par ailleurs, le rapport note que la Chine a développé «plusieurs scénarios» d'opérations militaires contre Taïwan, allant d'un blocus aérien et maritime à un débarquement à grande échelle visant à occuper Taïwan et ses îlots.

«Si les États-Unis intervenaient, la Chine pourrait tenter de retarder une intervention effective et chercher à l'emporter avec une guerre limitée, courte et intense», indique le Pentagone, rappelant sa politique d'une «Chine unique».

La Chine continentale et Taïwan sont dirigés par des régimes rivaux depuis la fin de la guerre civile chinoise en 1949. L'île se gère de façon autonome, mais les liens économiques restent forts entre les deux rives. Pékin considère Taïwan comme partie intégrante de la Chine et n'a pas exclu de la reprendre par la force en cas de déclaration formelle d'indépendance.

Le Pentagone note cependant qu'une intervention de ce genre «présente un risque politique important et probablement rédhibitoire», parce qu'il galvaniserait le sentiment nationaliste à Taïwan et que la communauté internationale s'y opposerait.

Les États-Unis, qui sont opposés à tout changement du statu quo dans cette région, entretiennent des liens ambigus avec Taïwan: ils n'ont pas de relations diplomatiques avec ce territoire, mais conservent des relations commerciales avec lui et lui vendent des armements.

Le Pentagone évalue à 190 milliards US le budget de l'Armée populaire de Chine en 2017, un chiffre supérieur aux 154,3 milliards US déclarés par Pékin, mais nettement inférieur aux 700 milliards US débloqués par le Congrès américain pour le budget annuel du Pentagone.

L'armée chinoise est engagée dans un vaste programme de modernisation, destiné à «mener et gagner des guerres», selon les termes du président chinois Xi Jinping.