Les dirigeants de Vanuatu, dans le Pacifique, ont décidé d'évacuer de manière permanente les habitants d'une des îles de l'archipel, afin de les mettre définitivement à l'abri des éruptions volcaniques qui tuent les récoltes, salissent l'eau et empoisonnent l'air.

Les quelque 10 000 personnes qui habitent toujours l'île Ambae ont des sentiments mitigés face à leur départ: ceux qui sont les plus durement touchés par les chutes de cendres trépignent d'impatience, tandis que les autres refusent de perdre leur culture et leur terre.

L'île a été évacuée temporairement en septembre quand le cycle d'éruptions a repris. Cette fois, les dirigeants ont décidé que l'évacuation sera permanente.

Un porte-parole du gouvernement, Hilaire Bule, a dit à l'Associated Press jeudi qu'il s'attend à voir le conseil des ministres entériner le déménagement d'ici la semaine prochaine. Il a expliqué qu'on offrira aux insulaires de se déplacer vers deux îles voisines.

«Ça n'a pas été une décision facile», a-t-il dit.

Il a ajouté que plusieurs détails doivent encore être peaufinés, notamment en ce qui concerne l'accès à l'école et aux installations. On devra aussi trouver des maisons et des terrains pour les déplacés.

Plusieurs habitants entretiennent des liens familiaux et spirituels étroits avec les îles vers lesquelles ils seront envoyés, Maewo et Pentecôte, selon M. Bule. La religion traditionnelle enseigne même que les îles forment une famille - Pentecôte est la mère, Maewo le père et Ambae le fils.

La plupart des habitants d'Ambae survivent grâce à l'agriculture et à la pêche. Des centaines de personnes ont déjà été déplacées vers des abris temporaires dans des secteurs de l'île moins touchés par les cendres.

Ambae fait environ 400 kilomètres carrés et est l'une des 65 îles habitées de l'archipel de Vanuatu, qui compte environ 280 000 habitants.

Vanuatu chevauche la «ceinture de feu» du Pacifique, une bande de failles sismiques qui encercle l'océan Pacifique et où les séismes et éruptions volcaniques sont fréquents.

Brad Scott, un volcanologue du gouvernement néo-zélandais envoyé en renfort à Vanuatu, dit que plus du quart d'Ambae a été lourdement touché et que plusieurs toits de chaume traditionnels se sont effondrés sous le poids des cendres.

Des jardins traditionnels ont été enterrés, voire anéantis, en certains endroits et l'eau est décolorée, en plus d'avoir un goût étrange. M. Scott met aussi en garde contre la quantité élevée de cendres fines qui peuvent causer des problèmes respiratoires.

Des pays comme la France, l'Australie et la Nouvelle-Zélande ont offert une aide, financière ou autre, en lien avec l'évacuation. La contribution de 225 000 $ US de l'Australie ciblera plus spécifiquement les besoins des mères, des enfants et des handicapés.

Malgré tous ces problèmes, dit M. Scott, plusieurs habitants souhaitent rester.

«Il y a eu une bonne dose de résistance de la part de la communauté, a-t-il expliqué. Certains, qui sont les plus touchés par les chutes de cendres, préféreraient être n'importe où sur la planète. D'autres ont des liens culturels très forts.»

M. Scott dit que le volcan Manaro, sur l'île d'Ambae, a connu une éruption importante il y a environ 400 ans et plusieurs éruptions plus modestes depuis 100 ans. L'éruption actuelle a été composée de trois phases et la plus récente, qui a débuté en mars, a généré le plus de cendres.

Il dit que le volcan s'est calmé depuis deux semaines, même s'il est impossible de dire à quel moment la prochaine phase explosive commencera.

Quand on lui demande si les évacués pourraient un jour avoir la chance de rentrer chez eux, M. Bule dit que ce n'est pas à lui qu'il faut poser la question.

«On ne sait pas, a-t-il répondu. Demandez au volcan.»