La Chine va «s'ouvrir davantage», traiter «équitablement» les firmes étrangères et renforcer le rôle du marché: autant de promesses martelées mercredi par le président Xi Jinping, à l'heure où l'Etat-Parti semble conforter son emprise sur la deuxième économie mondiale.

«L'ouverture amène le progrès, la fermeture nous ramène en arrière. La Chine ne va pas fermer ses portes, mais s'ouvrir davantage», a assuré M. Xi, lors d'un discours-fleuve ouvrant le XIXe congrès quinquennal du Parti communiste chinois (PCC) au pouvoir.

Le dirigeant, qui doit se voir octroyer un nouveau mandat de cinq ans, semblait ainsi retrouver ses accents de Davos, où il avait défendu début 2017 la mondialisation et le libre-échange.

«Nous assouplirons considérablement les conditions d'accès au marché (...), nous protégerons les droits et intérêts légitimes des investisseurs étrangers. Toutes les entreprises enregistrées en Chine seront traitées sur un pied d'égalité», a promis Xi Jinping sous les ors du Palais du Peuple à Pékin.

Acclamé par quelque 2330 délégués du Parti, il s'est aussi engagé, sans fournir de calendrier, à poursuivre la libéralisation du marché des changes --alors que la convertibilité du yuan demeure très encadrée.

De quoi conforter la transition d'une «croissance rapide» à un développement économique «axé sur la qualité» et la réduction des inégalités, selon M. Xi.

«Lassitude»

En promettant l'équité aux entrepreneurs étrangers, Xi Jinping délivre «un discours bienvenu, fort de nobles sentiments», a réagi Peter Fuhrman, du cabinet China Capital First.

Non sans prudence: «Il reste à espérer que les fonctionnaires moins visionnaires et plus prompts à l'obstruction suivront ces directives à la lettre», a-t-il indiqué à l'AFP.

D'autant que le discours paraît contraster avec la réalité: Bruxelles et Washington, principaux partenaires commerciaux de Pékin, dénoncent ainsi volontiers le protectionnisme du géant asiatique, accumulant les enquêtes commerciales à son encontre.

Si l'administration Trump a certes reconnu mardi que la Chine ne manipulait pas sa monnaie, elle a lancé mi-août une vaste enquête sur les pratiques chinoises en termes de propriété intellectuelle.

Surtout, les entreprises étrangères déplorent des discriminations grandissantes face à leurs concurrents locaux et aux puissants groupes d'État. Elles sont interdites d'accès à plusieurs secteurs, ou, dans d'autres, doivent impérativement s'associer en coentreprise avec un partenaire local, avec parfois des transferts technologiques forcés.

Dans ce contexte, la Chambre de commerce européenne à Pékin a salué le discours de Xi Jinping, tout en rappelant que les entreprises souffraient d'une «lassitude face aux promesses» non tenues.

«L'unique remède est la mise en oeuvre (effective)des promesses», a insisté l'organisation dans une réaction transmise à l'AFP. «C'est désormais plus important que jamais» d'appliquer les politiques évoquées, a insisté son président, Mats Harborn.

Secteur étatique «conforté»

Or, si Xi Jinping a appelé mercredi à «soutenir» le «développement des entreprises privées» et plaidé pour «l'abrogation» des règlements empêchant «une concurrence loyale», le dirigeant a aussi enjoint à «consolider et développer sans relâche le secteur public».

Le régime continue en effet de choyer ses groupes étatiques, en fusionnant certains pour créer des champions nationaux, et soutenant ceux en difficulté... quitte à leur imposer une cure d'efficacité et à rogner leurs surcapacités.

En même temps, l'État semble conforter son influence sur le secteur privé; Pékin s'est récemment attaché à restreindre les investissements de grands conglomérats privés endettés: Wanda, Fosun, l'assureur Anbang...

En fait, le gouvernement entend bien s'attaquer, à coup de durcissement réglementaire, aux risques financiers, à l'envolée d'une dette chinoise devenue colossale, et aux dérives du marché immobilier --"un appartement est fait pour vivre, non pour spéculer», à tonné Xi Jinping mercredi.

«Il est assez inhabituel pour un haut dirigeant d'être aussi direct (...) Tout assouplissement des restrictions sur l'immobilier est improbable pour 2018», a commenté Larry Hu, analyste de Macquarie.

Pékin pourrait ainsi chercher un équilibre entre contrôles gouvernementaux et dynamisme du secteur privé, en vue de réduire les inégalités de plus en plus criantes dans la société, et de répondre au désir grandissant d'un meilleur environnement.

«Les dirigeants du Parti veulent clairement transmettre le message que la croissance économique reste importante, mais qu'elle n'est plus suffisante», insiste M. Hu.

Contrairement à son prédécesseur Hu Jintao il y a cinq ans, Xi Jinping n'a d'ailleurs dévoilé mercredi aucun objectif de croissance à long terme.

PHOTO Aly Song, REUTERS

Le président chinois Xi Jinping donne une allocution à l'ouverture du congrès du Parti communiste chinois.