Le chef de la diplomatie américaine a fait jeudi un constat d'échec des efforts diplomatiques menés ces 20 dernières années face aux ambitions nucléaires de la Corée du Nord et a appelé à adopter «une nouvelle approche».

Lors d'une visite au Japon, première étape d'une tournée en Asie consacrée à la récente crise nord-coréenne, Rex Tillerson a aussi exhorté Pékin, où il se rendra samedi, à faire plus fortement pression sur son allié nord-coréen.

«Je pense qu'il est important de reconnaître que les efforts politiques et diplomatiques des vingt dernières années pour mener la Corée du Nord à se dénucléariser ont échoué», a déclaré le nouveau secrétaire d'État.

Pyongyang a tiré le 6 mars une salve de missiles balistiques dont trois ont fini leur course en mer près de l'archipel nippon. Le Nord ambitionne de mettre au point un missile intercontinental balistique (ICBM) capable de porter le feu nucléaire sur le continent américain. Le président américain Donald Trump a promis que cela ne se produirait pas.

«Face à cette menace qui ne cesse de grandir, il est clair qu'une nouvelle approche est nécessaire», a plaidé M. Tillerson au cours d'une conférence de presse conjointe avec le ministre japonais des Affaires étrangères Fumio Kishida.

«Nouveau niveau de menace»

Le secrétaire d'État américain a réaffirmé que les États-Unis continueraient à travailler étroitement avec le Japon et la Corée du Sud, où il est attendu vendredi, afin de contrer les provocations du régime de Pyongyang.

Il a néanmoins tendu la main au peuple nord-coréen. «La Corée du Nord et son peuple ne doivent pas craindre les États-Unis et leurs voisins», a-t-il insisté.

M. Tillerson a aussi appelé Pékin à faire plus fortement pression sur son allié. La Chine apparaît comme le dernier pays ayant un ascendant suffisant sur la Corée du Nord, qui a fait fi de plusieurs séries de sanctions prises sous l'égide de l'ONU. «Nous pensons qu'ils ont un rôle très important à jouer», a-t-il dit. «Nous allons parler avec la Chine d'autres mesures qu'ils devraient entreprendre».

«Nous devons appeler, avec les États-Unis, la Chine à jouer un rôle constructif», a renchéri son homologue japonais en réaffirmant les déclarations de Tokyo selon lesquelles «les actions provocatrices» de Pyongyang avaient «apparemment atteint un nouveau niveau de menace».

Pékin partage les préoccupations de Washington au sujet des tentatives de construction d'un arsenal nucléaire par le régime reclus, mais est beaucoup plus mesuré dans ses réactions au sujet de son programme de missiles balistiques.

«Explorer toutes les options»

Le gouvernement chinois s'est montré réticent à soutenir toute action qui pourrait déstabiliser le régime de Kim Jong-Un et se montre en public plus inquiet de la décision de Washington de déployer en Corée du Sud le bouclier antimissile américain THAAD (Terminal High-Altitude Area Defense). Ce geste provoque la colère de la Chine, même si Washington assure qu'il s'agit d'un armement «défensif».

Le ministre chinois des Affaires étrangères Wang Yi avait appelé la semaine dernière la Corée du Nord à suspendre ses activités nucléaires et balistiques en échange d'une suspension des exercices militaires américains. Avant les déclarations à Tokyo du responsable américain, Pékin avait jeudi, par la voix de la porte-parole du ministère des Affaires étrangères Hua Chunying, affirmé qu'il s'agissait là de «la seule option réalisable» et a mis Washington au défi d'avancer «une meilleure proposition».

James Kim, un analyste du groupe de réflexion Asan Institute of Policy Studies, basé à Séoul, estime que les propos de M. Tillerson laissent entendre que les États-Unis vont «explorer toutes les options», depuis «des frappes préemptives» des sites balistiques et nucléaires «jusqu'au dialogue» moyennant un engagement clair à se désarmer.

Pour lui, Washington pourrait mettre en oeuvre des sanctions plus dures face à une Corée du Nord qui «depuis les années 1990, s'est éloignée du Traité de non-prolifération et a développé son programme d'armement nucléaire». Le premier essai nucléaire nord-coréen remonte à 2006.

Arrivé mercredi soir au Japon, Rex Tillerson s'est également entretenu avec le premier ministre Shinzo Abe.