La présidente sud-coréenne Park Geun-Hye a limogé son chef de gouvernement et deux de ses principaux ministres en réponse à un scandale politique majeur impliquant son ex-confidente toujours en garde à vue.

L'occupante de la «Maison bleue», siège de la présidence, est ébranlée par une série de révélations selon lesquelles elle se faisait conseiller pour la conduite des affaires de l'État par une amie de 40 ans qui n'occupait pourtant aucun poste officiel et n'avait aucune habilitation en matière de sécurité.

Surnommée «Raspoutine» par les médias, Choi Soon-Sil, 60 ans, est visée par une enquête pour trafic d'influence et corruption. Elle est soupçonnée d'avoir profité de ses entrées pour extorquer de l'argent aux principaux conglomérats du pays.

Au plus bas dans les sondages, la présidente, dont 67% des Sud-Coréens souhaitent la démission selon une enquête publiée mardi, a riposté mercredi en relevant de ses fonctions le premier ministre Hwang Kyo-Ahn.

Une décision prise «en raison de la situation actuelle», a sobrement commenté le porte-parole de la présidence, Jung Youn-Kuk, ajoutant que le ministre des Finances et son collègue de la Sécurité publique avaient subi le même sort.

Pour calmer l'opinion publique à un an de la fin de son mandat, Mme Park entend former un cabinet d'union nationale à coloration politique neutre.

Troisième jour d'audition 

Kim Byong-Joon, ancien proche conseiller de l'ex-président Roh Moo-Hyun, a été nommé à la tête du gouvernement, un poste largement honorifique dans un pays où le pouvoir est entre les mains du chef de l'État.

Les médias sont depuis plus d'une semaine déchaînés sur la très controversée Mme Choi, fille d'une mystérieuse figure religieuse, Choi-Tae-Min, chef autoproclamé d'un culte religieux, l'Eglise de la vie éternelle.

Choi-Tae-Min était devenu le mentor de Park Geun-Hye après l'assassinat de sa mère, en 1974.

Et l'opinion s'est insurgée contre l'influence prêtée à Mme Choi, qui allait jusqu'à corriger les discours présidentiels, prodiguer des conseils sur les nominations et aurait eu accès à des documents confidentiels.

Les excuses publiques de la présidente, vendredi, n'ont rien changé: moins de 10% des Sud-Coréens approuvent désormais son action, selon le sondage publié mardi.

Rentrée dimanche d'Allemagne, où elle avait fui en septembre, Mme Choi s'est rendue librement lundi au bureau du procureur du district de Séoul, ou son arrivée a déclenché une cohue sans nom.

Les enquêteurs, qui l'ont ensuite placée en garde à vue, devraient demander mercredi son placement en détention provisoire, selon des sources officielles citées par l'agence sud-coréenne Yonhap.

Elle a de nouveau été escortée mercredi matin au bureau du procureur, pour une troisième journée d'auditions.

Remaniement «cosmétique» 

Des images de la chaîne YTN l'ont montrée mercredi à son arrivée, le visage caché par un masque chirurgical, le pantalon bleu nuit de sa tenue de détenue apparaissant sous un long manteau noir.

Alors que les appels à sa démission se sont multipliés, la présidente a choisi de tenter d'atténuer la crise en élargissant son gouvernement au-delà de son parti conservateur Saenuri, déjà affaibli en avril par une déroute aux législatives.

Mais l'opposition a exigé d'être consultée avant toute nomination et fait d'un examen approfondi de la relation entre Mmes Choi et Park un préalable à toute participation au gouvernement.

Principale formation de l'opposition, le Parti démocrate de Corée a jugé mercredi les remaniements purement cosmétiques.

«Les gens demandaient au président un gouvernement qui ne soit pas contrôlé par Choi Soon-Sil mais il a obtenu un deuxième gouvernement Choi Soon-Sil», a déclaré un porte-parole du Parti démocrate.

Selon les médias sud-coréens, Choi Soon-Sil aurait hérité de son père, décédé en 1994, une influence inappropriée et malsaine sur la présidente. L'ex-époux de Choi Soon-Sil avait été un des principaux adjoints de Mme Park jusqu'à son élection en 2012.

Le journal Hankyoreh a rapporté mardi que Mme Choi était une habituée de la «Maison bleue» depuis l'investiture de Mme Park en février 2013. Mais la présidence a vivement démenti cette affirmation. La chef de l'État a simplement concédé avoir demandé quelques conseils à Mme Choi sur certains discours.