Pyongyang et Séoul ont convenu de reprendre les discussions au plus haut niveau dimanche, après quelque dix heures de négociations infructueuses, pour trouver une issue à la crise qui a failli précipiter la péninsule coréenne dans un conflit armé.

Les deux parties ont décidé de se réunir à nouveau à 15h00 locales dimanche afin de «réduire les divergences», après la suspension des discussions dans la nuit vers 04h00 locales.

La rencontre, organisée dans le village frontalier de Panmunjom, avait débuté samedi dans l'après-midi après l'expiration d'un ultimatum de la Corée du Nord, qui avait menacé son rival d'une «guerre totale» s'il ne cessait pas sur-le-champ ses opérations de propagande.

Les tensions ont redoublé ces dernières heures dans la péninsule, qui n'avait pas connu pareille escalade depuis des années, même si les experts avaient appelé à relativiser les annonces belliqueuses de Pyongyang, coutumier du fait.

En prévision de l'heure dite, l'armée du peuple coréen (KPA) avait assuré que ses unités déployées à la frontière s'étaient placées «en état de guerre», prêtes à riposter si Séoul n'obtempérait pas.

«Nous sommes arrivés à l'aube d'une guerre et la situation est irréversible», avait même lancé, menaçant, le ministère nord-coréen des Affaires étrangères.

L'agence sud-coréenne Yonhap, citant des sources militaires, avait fait état de mouvements d'unités d'artillerie au Nord, tandis que des avions de chasse américains et sud-coréens avaient effectué des exercices de simulation de bombardement à la mi-journée dans une claire démonstration de force.

Des milliers de civils sud-coréens avaient également rejoint des abris souterrains par mesure de précaution.

«Ne pas perdre la face»

Au lendemain d'une déclaration ferme de la présidente Park Geun-Hye, les autorités à Séoul ont fait savoir qu'elles n'avaient pas l'intention de céder aux injonctions de leur voisin, et de faire taire ces haut-parleurs qui diffusent à plein volume leurs messages à la frontière.

La Corée du Sud a décidé de reprendre sa guerre de propagande - une pratique que les deux pays avaient cessée en 2004 d'un commun accord - en représailles à une attaque à la mine antipersonnel imputée à la Corée du Nord, dans laquelle deux de ses soldats avaient été mutilés début août. Elle réclame des excuses de Pyongyang, qui dément toute responsabilité dans ces explosions.

La situation s'est envenimée jusqu'à déboucher jeudi sur un exceptionnel échange de tirs d'artillerie entre les deux ennemis.

Les négociations de Panmunjom, village où fut signé l'armistice de 1953, offrent la possibilité aux deux pays de calmer le jeu, mais l'issue s'annonce très incertaine, de l'avis des observateurs.

«Ce ne sera pas facile de trouver une solution dans laquelle aucune des deux parties ne perd la face», a commenté Dan Pinkston, expert à l'International Crisis Group à Séoul.

«Il sera intéressant de voir si le Nord peut apporter quelque chose - peut-être une reprise des réunions des familles séparées par la guerre - afin de permettre au Sud d'éteindre ses mégaphones», a-t-il ajouté.

Quatre dirigeants ont pris place autour de la table dont, pour le Sud, le conseiller à la Sécurité nationale Kim Kwan-Jim, et pour le Nord, le vice-président de la Commission nationale de défense, Hwang Pyong-So, considéré comme le numéro deux du régime.

Appels au calme

Techniquement, les deux pays sont en conflit depuis 65 ans, car la guerre de Corée (1950-53) a pris fin avec un simple cessez-le-feu qui n'a jamais été formalisé par un traité de paix en bonne et due forme.

La dernière attaque directe contre le Sud date de décembre 2010, lorsque la Corée du Nord avait bombardé l'île sud-coréenne de Yeonpyeong, causant la mort de deux soldats et deux civils sud-coréens.

La situation est surveillée de près par la communauté internationale. L'ONU a exhorté les deux Corées à mettre fin à l'escalade de tensions, tandis que les États-Unis, qui disposent de quelque 30 000 militaires en Corée du Sud, ont invité Pyongyang à la retenue.

Le chef d'état-major interarmées américain, le général Martin Dempsey, a «réitéré l'engagement inébranlable des États-Unis» auprès de la Corée du Sud et «la force de l'alliance» qui unit les deux pays, dans un communiqué publié samedi par le Pentagone.

La Chine, principal soutien de la Corée du Nord, a également lancé des appels au calme, désireuse d'éviter tout esclandre au moment où elle tente d'attirer des dirigeants du monde entier à Pékin début septembre pour assister aux commémorations de la défaite japonaise de 1945.