Une loi interdisant la discrimination raciale a été présentée mardi devant une commission sénatoriale, en réponse aux «discours de haine» prononcés à l'égard des étrangers au Japon, mais ce texte soumis par l'opposition n'est pas accompagné de mesures de sanction.

Déposée en mai par le Parti démocrate du Japon (PDJ), cette proposition de loi bannit la ségrégation xénophobe en général, visant en particulier les diatribes racistes de groupuscules de l'extrême droite nippone à l'égard de Coréens et autres étrangers.

Ces propos féroces ont d'autant plus de résonance qu'ils trouvent des relais importants via les réseaux sociaux en ligne.

«Les discours de haine, qui nient la dignité et l'égalité des hommes, font un nombre croissant de victimes, enfants et adultes qui en sont blessés à jamais», a souligné mardi Toshio Ogawa, élu du PDJ, lors de la séance d'explication du texte devant la commission de la justice .

La loi vise aussi les ségrégations à l'entrée des clubs de karaoké, de stades ou autres lieux qui osent parfois afficher «réservé aux Japonais».

Cette approche légale était dans un premier temps peu soutenue par la majorité que constitue le Parti libéral-démocrate (PLD), mais cette formation, présidée par le premier ministre de droite Shinzo Abe, aurait fini par accepter l'idée d'une loi antiraciste.

Fin août 2014, pendant le Comité du Haut-commissariat aux droits de l'Homme de l'ONU pour l'élimination de la discrimination raciale, de nombreux membres étrangers s'étaient montrés très préoccupés par le phénomène des discours de haine au Japon.

Dans ses conclusions, l'instance des Nations Unies a «instamment prié l'État japonais d'adopter une législation spécifique et globale interdisant la discrimination raciale, à la fois directe et indirecte (conformément à la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale), afin de permettre aux victimes des faits visés de demander réparation en justice».

Le Japon ne dispose pas encore d'une loi interdisant toute forme de discrimination ou d'incitation à la haine. Un acte discriminatoire n'y est donc en soi pas illégal, seuls les éventuels délits associés reconnus dans le Code civil ou pénal sont punis.

«Si ces discours de haine trouvent de multiples origines, ils s'inscrivent sur fond d'absence totale de législation antidiscrimination, de manque de connaissance de l'histoire des minorités, d'ignorance du gouvernement en matière de droits reconnus internationalement», dénonçait alors sur son site internet le Centre d'information des droits de l'Homme en Asie-Pacifique, basé au Japon.

Les victimes peuvent certes porter plainte au Japon, mais «dans presque tous les cas», déplore-t-il, elles n'obtiennent pas gain de cause faute de reconnaissance des normes internationales dans la législation locale.