Un célèbre avocat chinois, éminent défenseur des droits de l'homme, a été inculpé vendredi après plus d'un an de détention, pour des commentaires publiés sur Internet, ont annoncé les services du procureur à Pékin.

Ces poursuites visant Pu Zhiqiang, 50 ans, ont été immédiatement dénoncées par les organisations de défense des libertés et par les États-Unis, qui ont fait part de leur «vive préoccupation».

M. Pu est accusé d'«incitation à la haine ethnique», de «provocation à la querelle et fomentation de troubles», des charges qui font encourir respectivement dix et cinq ans de prison en Chine.

L'avocat, qui a notamment défendu le célèbre artiste dissident Ai Weiwei, avait publié ces opinions sur son compte de microblogues Sina Weibo, très surveillé par les autorités.

Dans un de ses commentaires, Pu Zhiqiang avait remis en question la version officielle d'une attaque «terroriste» dans la région à dominante musulmane du Xinjiang. Dans un autre, il avait accusé le Parti communiste de mentir.

Amnesty International a réagi en appelant les autorités chinoises à «cesser de persécuter» Pu Zhiqiang.

«Il n'a rien fait d'autre que donner son avis sur l'actualité sur les réseaux sociaux. Le gouvernement chinois viole de façon patente sa liberté d'expression et tente d'étouffer une voix indépendante», a affirmé William Nee, expert de la Chine chez Amnesty.

Pour le Département d'État américain, qui s'est exprimé par l'un de ses porte-parole, l'inculpation de Pu «semble s'inscrire dans une tendance systématique en Chine d'arrestations et de mises en détention d'avocats, de cybermilitants, de journalistes, de responsables religieux et autres qui remettent en question les politiques officielles».

Le secrétaire d'État américain, John Kerry, se trouve samedi et dimanche à Pékin, où il doit être reçu par les deux plus hauts dirigeants chinois, le président Xi Jinping et le premier ministre Li Keqiang.

Le sujet des droits de l'homme doit être abordé lors des discussions.

Selon son épouse Meng Qun, Pu Zhiqiang a une santé précaire, souffrant notamment de diabète et d'hypertension.

«Il a été interrogé chaque jour durant plus de 10 heures d'affilée au cours des trois premiers mois de sa détention», a décrit la femme dans une lettre ouverte, un traitement qu'elle a qualifié de «torture inhumaine, physique et mentale».

M. Pu n'a quasiment aucune chance d'échapper à une lourde peine, d'autant que les accusations qui le visent touchent à la sphère politique et à l'image du Parti communiste.

En 2014, le taux de condamnation des tribunaux chinois --où les droits de la défense sont régulièrement malmenés-- a atteint 99,93%: 1,184 million de personnes ont été reconnues coupables des faits qui leur étaient reprochés et seulement 825 ont été acquittées.

Sous la présidence de Xi Jinping, ONG et experts dénoncent un durcissement de la répression contre les voix critiques à l'égard du régime, visant autant les militants des libertés que les simples blogueurs.