Le secrétaire d'État américain John Kerry a milité samedi en faveur d'une «vraie réconciliation» entre la majorité cinghalaise et la minorité tamoule au Sri Lanka, une île d'Asie du Sud meurtrie par la guerre civile, lors d'une visite de soutien au nouveau régime démocratique.

Lors de ce premier voyage officiel d'un chef de la diplomatie américaine à Colombo depuis près d'un demi-siècle, M. Kerry a également salué les «immenses progrès» réalisés depuis l'arrivée au pouvoir du président élu démocratiquement en janvier, Maithripala Sirisena, qui a défait l'ancien homme fort Mahinda Rajapakse.

Cette transition démocratique spectaculaire a été fort bien accueillie à Washington et en Europe après des années de brouille entre l'Occident et le Sri Lanka en raison de la brutalité avec laquelle le précédent régime avait mis fin en 2009 à la guerre de trois décennies contre la rébellion des Tigres tamouls. Le conflit a fait des dizaines de milliers de morts.

Le nouveau président Sirisena a promis d'encourager les efforts de réconciliation avec la minorité tamoule plus ardemment que son prédécesseur, une initiative saluée par le chef de la diplomatie américaine.

«Le Sri Lanka est à un moment charnière. La paix s'est installée mais la vraie réconciliation prendra du temps», a prévenu John Kerry dans un long discours devant des hommes d'affaires, universitaires et diplomates, après son entretien avec le chef de l'État.

«Une paix réellement durable après une guerre civile requiert des politiques facilitant la réconciliation», a-t-il plaidé.

Le nouveau pouvoir a dévoilé un programme de réformes incluant en particulier une enquête anticorruption visant l'ancien régime Rajapakse, ainsi que la coopération annoncée de Colombo à l'enquête de l'ONU sur d'éventuelles violations des droits de l'homme à la fin de la guerre civile en 2009.

«Nous espérons que le gouvernement va continuer à coopérer avec les Nations unies», a ajouté M. Kerry qui a aussi réclamé la «libération des prisonniers politiques» encore détenus.

L'ONU, avec le soutien de Washington, enquête depuis plus d'un an sur de possibles crimes de guerre commis lors de l'offensive finale de l'armée qui a peut-être tué plus de 40.000 civils.

Le Sri Lanka a toutefois obtenu en février dernier un ajournement du rapport de l'ONU, le temps de mettre en place une juridiction locale et mener ses propres investigations.

Interrogé lors d'une conférence de presse sur une éventuelle «ingérence» des États-Unis dans les affaires intérieures du Sri Lanka, John Kerry a assuré qu'il était venu pour «proposer, pas pour exiger».

Il a d'ailleurs concédé qu'«aucun pays, y compris les États-Unis» n'avait un «bilan parfait» en matière de droits de l'homme, en allusion aux émeutes de Baltimore (est des États-Unis) et aux tensions raciales.

Partenariat annuel

Dans la matinée, le dirigeant américain avait annoncé aux côtés de son homologue sri-lankais Mangala Samaraweera la mise sur pied d'un «partenariat annuel de dialogue» entre les deux pays.

«Nous avons parlé aujourd'hui des immenses progrès réalisés par le Sri Lanka en seulement quelques mois», a lancé John Kerry après son entretien avec M. Samaraweera qui s'était rendu à Washington en février.

«Je lui ai promis que les États-Unis voulaient travailler avec le Sri Lanka et l'aider par tous les moyens possibles», a-t-il poursuivi, parlant d'une île «paradisiaque» qui revêt «de très très grandes promesses pour l'avenir».

«Aujourd'hui marque le début d'une amitié très, très spéciale», lui a répondu le chef de la diplomatie du Sri Lanka.

«Dans ce voyage pour rétablir votre démocratie, le peuple américain se tiendra à vos côtés», a promis John Kerry.

Le Sri Lanka, l'ex-Ceylan tour à tour colonisé par les Portugais, les Hollandais et les Britanniques est une île de plus de 20 millions d'habitants située au sud-est de l'Inde. Elle occupe une place stratégique au carrefour de routes maritimes de l'océan Indien qui intéressent tout autant la Chine, l'Inde que les États-Unis.