Des policiers d'élite en tenue de combat, un assaillant armé, un message en arabe et des otages collés aux vitres d'un café pour servir de bouclier humain : le coeur de Sydney a basculé lundi dans le cauchemar et la peur.

Sur Martin place, une esplanade qui héberge de nombreux commerces, bureaux et administrations, le café Lindt était pavoisé aux couleurs de Noël. Mais en milieu de matinée, sous un soleil vif d'été austral, un drapeau noir portant des caractères arabes a troublé le «Merry Christmas» peint en lettres d'or sur la façade.

La situation à l'intérieur du café restait confuse lundi soir, de même qu'étaient incertaines les motivations réelles du preneur d'otages. Ce dernier a cependant obligé deux de ses prisonniers à tendre une pièce de tissu sur lequel serait écrite la shahada, ou profession de foi musulmane : «Il n'y a de Dieu qu'Allah et Mahomet est son prophète».

«C'est choquant pour tout le monde», réagissait Goldie Jamshidi, une employée travaillant non loin du café. «Je suis venue travailler et soudain j'apprends ce qu'il se passe».

Cinq otages ont recouvré la liberté, dont deux femmes portant des tabliers Lindt qui se sont jetées dans les bras de policiers des unités d'intervention spécialisées. On ignorait s'ils avaient été libérés ou s'étaient échappés.

Au-delà du cordon de sécurité, des passants prenaient des photos que certains postaient sur les réseaux sociaux, d'autres secouaient la tête, abasourdis.

Le gouvernement australien multiplie depuis quelques mois les arrestations de personnes soupçonnées de soutenir l'organisation État islamique (EI) ou de faciliter le départ de jeunes Australiens pour combattre en Syrie ou en Irak. À plusieurs reprises, il a mis en garde la population contre les risques d'attentats de «loups solitaires» sur son sol et relevé en septembre son alerte terroriste.

«Il est triste de penser que c'est mon pays et que cela pourrait survenir n'importe où», déplorait Rebecca Courtney, une employée de bureau.

Le premier ministre Tony Abbott a exhorté les Australiens à ne pas céder à la peur et à «vaquer à leurs occupations habituelles».

Mais beaucoup d'enseignes du centre de Sydney situées en dehors du périmètre établi par la police avaient baissé leurs rideaux. «Tous les magasins autour de nous sont fermés pour raison de sécurité», témoignait Marian Chung, gérante d'une boutique touristique vendant des kangourous et des koalas en peluche.

Elle n'a pas fermé. Ses clients ont parcouru des milliers de kilomètres et leur séjour est réservé.

La psychose a redoublé lorsque, peu après l'annonce de la prise d'otages, la police a fait état d'une opération au célèbre Opéra de Sydney. Il s'agissait visiblement d'une alerte à la bombe sans rapport. Les représentations de la soirée ont été annulées.

Une quarantaine d'organisations musulmanes australiennes ont dénoncé tout acte destiné à «susciter la peur et la terreur dans les coeurs».