Le dalaï-lama peut-il unilatéralement décider de ne pas se réincarner en son successeur? C'est la question qui se pose cette semaine, le prélat tibétain ayant récemment annoncé qu'il serait le dernier chef spirituel du pays. La Chine, hier, a nié qu'il avait le droit de prendre cette décision. Nos explications.

Succession

Ce n'est pas la première fois que le dalaï-lama avance qu'il sera le dernier de sa lignée. Mais ces dernières années, il avait aussi évoqué l'idée que le prochain dalaï-lama pourrait être une femme et se trouver à l'extérieur des frontières du Tibet. En 2011, il a pris sa retraite politique, une première pour un dalaï-lama depuis le XVIIIe siècle, quand le cinquième dalaï-lama a unifié le Tibet. Il avait nommé chef du gouvernement tibétain en exil Lobsang Sangay, qui avait été élu par la diaspora tibétaine établie à Dharmsala, en Inde. Chaque fois, la Chine a revendiqué son droit d'identifier la personne qui deviendra le 15e dalaï-lama quand le dalaï-lama actuel mourra et se réincarnera. Au moment de sa retraite politique, en 2011, le dalaï-lama avait affirmé qu'en 2015, quand il aurait 90 ans, il statuerait définitivement sur la question après consultation avec les leaders tibétains en exil.

Tradition

Après la mort d'un dalaï-lama, des prêtres et des représentants du gouvernement tibétain se mettent à la recherche de son successeur, de la personne en qui il s'est réincarné. Le dalaï-lama actuel avait deux ans en 1937 quand il a été identifié comme le successeur du 13e dalaï-lama, mort en 1933. Évidemment, le contrôle du gouvernement chinois restreindrait les activités de recherche du XVe dalaï-lama, ce qui explique la récente déclaration du dalaï-lama actuel, publiée par le magazine allemand Die Welt. La Chine a accusé hier le dalaï-lama de «chercher à pervertir l'histoire». Seul le troisième dalaï-lama, au 15e siècle, avait été trouvé à l'extérieur du Tibet - en Mongolie.

Panchen-lama

Un bras de fer avait opposé Pékin et le dalaï-lama au milieu des années 90 au sujet de la nomination du panchen-lama, le numéro deux de la hiérarchie tibétaine. Six ans après la mort du 10e panchen-lama, en 1989, le dalaï-lama avait décrété qu'il s'était réincarné en un petit garçon du nord du Tibet, qui a été immédiatement fait prisonnier par le gouvernement chinois. Un autre 11e panchen-lama a été désigné par Pékin.

Visa

La controverse sur la fin d'un demi-millénaire de réincarnations du dalaï-lama suit une victoire diplomatique de la Chine la semaine dernière. Le dalaï-lama devait participer à une réunion des Prix Nobel de la paix en Afrique du Sud, à la mi-octobre. Il a dû y renoncer face aux réticences sud-africaines à lui accorder un visa. Plusieurs observateurs ont jugé que la Chine, qui est maintenant le principal investisseur étranger en Afrique avec des échanges deux fois plus importants que les États-Unis, avait fait pression sur Pretoria pour qu'un visa soit refusé au chef spirituel tibétain.