Le Parlement pakistanais a rejeté à l'unanimité jeudi les demandes des opposants Imran Khan et Tahir ul-Qadri qui exigent une série de réformes et la démission du premier ministre Nawir Sharif pour mettre fin à leur sit-in dans le centre d'Islamabad.

Plusieurs s'attendaient jeudi à un discours en chambre de M. Sharif, confronté à sa plus importante crise politique depuis son retour au pouvoir à l'issue des législatives de mai 2013 que ses deux rivaux estiment entachées de fraudes massives.

Mais il a plutôt laissé la parole aux députés de l'assemblée qui ont adopté à l'unanimité une résolution rejetant les demandes «anticonstitutionnelles» des deux opposants, en appui au gouvernement qui négocie une sortie de crise.

Juste après l'adoption de la résolution, Imran Khan a annoncé qu'il abandonnait les pourparlers avec le gouvernement et qu'il poursuivrait son sit-in à Islamabad tant que le premier ministre Nawaz Sharif n'aurait pas démissionné, enfonçant un peu plus le pays dans la crise.Dans la nuit de mercredi à jeudi, l'entourage du premier ministre avait entamé des pourparlers avec les équipes d'Imran Khan, ancienne gloire du cricket reconverti dans la politique, et du chef politico-religieux - possédant également la citoyenneté canadienne - Tahir ul-Qadri afin de mettre un terme à cette saga politique qui paralyse la capitale.

«Les pourparlers avec le gouvernement sont terminés. Comment pourraient-ils même aller de l'avant alors que nous exigeons au préalable la démission du premier ministre Sharif», a déclaré M. Khan à ses partisans réunis devant le Parlement.

«Nawaz Sharif, j'ai une chose à vous dire, je ne quitterai pas cette place tant que vous n'aurez pas démissionné», a lancé M. Khan, du toit de son conteneur reconverti en mini-appartement meublé.

«Mes tigres, brisez vos chaînes, et venez ici. Aujourd'hui, une décision sera prise sur le futur du Pakistan, une marée humaine déferlera», s'est enflammé Khan dont l'intransigeance ulcère le gouvernement qui avait jusqu'ici fait preuve de retenue.

Le chef de la police d'Islamabad, soupçonné par certains, de sympathie envers M. Khan, a été démis jeudi de ses fonctions. Et la police a bouclé l'accès à la capitale afin d'empêcher les partisans de M. Khan venus de la province de rejoindre les manifestations au centre-ville, selon des sources policières.

Khan est le chef du Parti de la Justice (PTI), une formation arrivée en troisième place lors des élections de mai 2013 fort d'appuis chez les jeunes, la fragile classe moyenne et dans le nord-ouest. Or le PTI a annoncé cette semaine la démission future de l'ensemble de ses députés au Parlement et n'était pas représenté jeudi en chambre.

Qadri, lui qui a résidé sept ans au Canada, dirige un réseau d'écoles religieuses modérées et un mouvement politique bien organisé constitué de ses dévots.

Les deux hommes avaient promis un million de manifestants pour leur marche, entamée la semaine dernière, sur la capitale afin de réclamer la démission de M. Sharif et exiger une enquête sur les allégations de fraudes lors des dernières élections.

Mais leur appel n'a pas porté au-delà de leur noyau dur de fidèles qui sont néanmoins des milliers encore réunis dans la capitale qui vit depuis une semaine au rythme de cette saga politique.

Mardi soir, leurs partisans ont pénétré dans la «zone rouge», secteur hyper-sécurisé abritant le Parlement, la résidence du premier ministre et les ambassades, où ils campent désormais.

Cette intrusion, par des opposants soupçonnés de jouer le jeu de l'armée, ou du moins d'une partie de «l'establishment» militaire, avait alimenté les rumeurs dans un pays à l'histoire jalonné de coups d'État.

Mais l'armée a jusqu'à présent appelé au «dialogue» entre les opposants et le gouvernement.