Un responsable religieux profondément antigouvernemental a réclamé, samedi, la démission du premier ministre, soupçonné de fraudes lors des élections de l'an dernier, devant des milliers de protestataires.

L'imam Tahir-ul-Qadri,et le célèbre joueur de cricket devenu politicien Imran Khan, ont attiré des dizaines de milliers de manifestants au cours de deux rassemblements ayant provoqué des embouteillages à Islamabad. Ils réclament que le premier ministre Nawaz Sharif démissionne en lien avec de présumées fraudes commises lors des élections de mai 2013, chose que M. Sharif refuse de faire.

Leur contestation, qu'ils affirment vouloir maintenir jusqu'au départ du premier ministre, soulève des craintes d'instabilité politique dans ce pays possédant l'arme nucléaire qui n'a vécu sa première passation de pouvoirs démocratiques que l'an dernier.

Samedi, M. Qadri a demandé à ses partisans de continuer de protester jusqu'à ce qu'ils déclenchent une «révolution pacifique». Quant aux milliers de supporters de M. Khan, ils campaient tout près. MM. Khan et Qadri se sont engagés à faire descendre un million de partisans dans les rues d'Islamabad, une ville d'environ 1,7 million d'habitants. La police estime qu'environ 10 000 personnes étaient présentes à la manifestation de M. Qadri.

Peu après le discours de ce dernier, l'influent ministre Ahsan Iqbal a pressé les deux leaders de l'opposition de reculer sur leur demande de démission du premier ministre. «Nous espérons que les deux hommes feront preuve de flexibilité» pour mettre fin à l'instabilité politique», a-t-il déclaré.

M. Qadri, qui détient également la citoyenneté canadienne, dirige un groupe de milliers de fidèles grâce à son réseau de mosquées et d'écoles religieuses au Pakistan. L'an dernier, il a organisé une manifestation dans la capitale, réclamant de vagues réformes électorales en prévision du scrutin de mai, chamboulant la vie à Islamabad. De son côté, M. Khan dirige le parti Tehreek-e-Insaf, le troisième en importance au Parlement.

En prévision des manifestations, les forces de sécurité ont installé des conteneurs métalliques sur les routes pour faire office de barrières, et des policiers de l'escouade antiémeute se sont positionnés un peu partout. M. Sharif, lui-même renversé en 1999 par le coup d'État ayant ouvert la voie à l'ancien chef des armées Pervez Musharraf, a soutenu qu'il ne démissionnerait pas.

Le Pakistan, un pays doté de l'arme nucléaire et d'une population de 180 millions d'habitants, a principalement été dirigé par des dictateurs militaires depuis l'indépendance de 1947. L'armée conserve toujours une forte influence dans le pays, alors que l'État combat plusieurs groupes islamistes, mais n'a pas pris position dans cette plus récente affaire. Certains craignent toutefois que l'instabilité politique puisse pousser l'armée à intervenir.