Les rebelles d'un mouvement islamiste philippin opposé aux négociations de paix avec Manille ont pris en otage environ 180 villageois mardi, dont ils se servent comme boucliers humains, au deuxième jour d'une attaque contre une ville du sud de l'archipel.

Des tirs ont été entendus dès l'aube près de la ville portuaire de Zamboanga, une agglomération de 800 000 habitants située sur l'île de Mindanao, où ont débarqué lundi quelque 200 hommes armés, membres du Front moro de libération nationale (MNLF).

«Nous avons peur. Nous voulons que tout ça se termine aussi vite que possible, afin que nous puissions reprendre des vies normales», a déclaré à l'AFP Ed Laguatan, un habitant qui se terrait chez lui à Zamboanga.

Selon un dernier bilan des autorités, qui revoit le nombre de victimes à la baisse, quatre civils ont été tués et 14 blessés au début de l'attaque. Du côté des rebelles, on compte sept décès. Les autorités avaient évoqué précédemment le chiffre de 24 morts.

Les rebelles utilisent 180 habitants de six villages aux abords de Zamboanga comme boucliers humains pour se protéger des tirs des forces de sécurité, qui les encerclent, a déclaré le secrétaire de l'Intérieur Mar Roxas, lors d'une conférence de presse. Mais il a refusé le terme d'«otages», assurant que ces villageois n'étaient pas retenus prisonniers.

Selon un porte-parole de l'armée, Ramon Zagala, les 180 rebelles sont encerclés par 1500 soldats des troupes d'élite, un effectif renforcé par des policiers.

«Nos forces resteront sur place», a prévenu le porte-parole des rebelles, Emmanuel Fontanilla, au micro de la radio DZMM.

Le fondateur du MNLF, Nur Misuari, a déclaré «l'indépendance» des régions du sud à forte population islamique dans ce pays majoritairement catholique, et appelé ses hommes à prendre d'assaut les bâtiments publics.

Les négociateurs tentent à présent de convaincre les rebelles de relâcher les villageois, a indiqué Muktar Muarip, un responsable d'une communauté locale, qui participe aux négociations.

«Nous voulons les convaincre de rester là où ils sont et de ne pas se déplacer vers le centre-ville, car ça risque de faire de nouvelles victimes», a-t-il dit à l'AFP, ajoutant que de nombreux otages étaient détenus dans des mosquées. Quatre femmes et un enfant ont été libérés au petit matin mardi.

Les forces de l'ordre ont formé un cordon de sécurité autour des villages et patrouillent également en mer près du rivage de cette zone qui se situe à environ un kilomètre de l'agglomération.

Selon un journaliste de l'AFP, le gros des échanges de coups de feu avait lieu dans le village de Santa Barbara: des soldats dissimulés derrière des véhicules armés tiraient vers les rebelles, qui répliquaient, cachés dans les maisons de la bourgade.

Le président des Philippines Benigno Aquino a envoyé ses plus proches conseillers en matière de sécurité pour négocier une solution pacifique.

Le MNLF a signé un accord de paix avec le gouvernement en 1996 et renoncé à réclamer l'indépendance, privilégiant une simple autonomie de la région.

Manille discute par ailleurs depuis plusieurs mois avec le Front moro de libération islamiste (MILF), un autre mouvement indépendantiste, qui doit mettre en place une région autonome d'ici à 2016.

Misuari estime que ces négociations marginalisent son mouvement et le traité de 1996.