Pékin s'apprête à lancer une enquête pour corruption visant Zhou Yongkang, l'un des plus hauts dirigeants communistes de la décennie passée, durant laquelle il a supervisé l'appareil policier et judiciaire chinois, a rapporté vendredi un journal de Hong Kong.

Cette enquête contre Zhou, qui jusqu'à novembre 2012 faisait partie du Comité permanent du Bureau politique du Parti communiste chinois (PCC), l'organe suprême du pouvoir en Chine, a été annoncée par le South China Morning Post.

Ce serait la première fois depuis la Révolution culturelle (1966-76)qu'un personnage de ce rang serait visé par une enquête, souligne le journal.

Le quotidien, citant des «sources familières de la direction chinoise» non identifiées, précise que la décision a été prise au terme des entretiens annuels réunissant discrètement au mois d'août les leaders en poste et ceux récemment retraités dans la station balnéaire chinoise de Beidaihe (nord-est).

«Les hauts dirigeants ont pris cette décision en raison de la grogne croissante au sein du Parti causée par le niveau de corruption et l'immense fortune amassée par Zhou», a indiqué le South China Morning Post.

Le journal n'a pas précisé quand serait lancée l'enquête. Le numéro un chinois, Xi Jinping, aurait donné comme instruction d'aller «jusqu'au bout» de l'affaire.

Zhou Yongkang a déjà été par le passé la cible de rumeurs de corruption. Il s'était un temps retrouvé dans l'oeil du cyclone politique provoqué par la chute en 2012 de l'ex-membre du Bureau politique et ancien patron de la métropole de Chongqing, Bo Xilai, dont il était proche.

Zhou régnait en maître sur la Commission des affaires politiques et judiciaires du PCC, qui a la haute main sur la police et la justice en Chine.

Il avait quitté ses fonctions à l'occasion du renouvellement de la direction du PCC en novembre dernier.

Des vétérans du Parti avaient en mai 2012 appelé à son limogeage. Des rumeurs s'étaient en même temps propagées sur sa possible destitution.

La Chine attend l'annonce du verdict concernant Bo Xilai, dont le procès pour corruption s'est achevé lundi sur un réquisitoire demandant une peine sévère.

La brutale disgrâce l'an dernier du charismatique leader, un personnage flamboyant promis aux plus hautes fonctions dans la deuxième puissance mondiale, avait créé une onde de choc dans l'appareil communiste et le pays.

L'homme aux montres jugé

Un officiel chinois, dont le penchant pour les montres de luxe avait été dénoncé, photos à l'appui, sur les réseaux sociaux, est jugé vendredi pour corruption, ont annoncé des médias d'État.

Surnommé «Frérot montres» sur l'internet chinois, Yang Dacai, ex-directeur du Bureau d'inspection de la sécurité de la province du Shaanxi (nord), avait été démis de ses fonctions en septembre 2012 en raison de «graves manquements à la discipline» du Parti communiste.

Les déboires ont commencé pour M. Yang le jour où il avait été photographié en train d'afficher un large sourire sur le site d'une collision entre un autocar et un camion-citerne qui avait fait 36 morts dans sa région en août 2012.

En dépit de ses excuses, il était alors devenu la bête noire des internautes chinois, qui ont rassemblé et mis en ligne sur le site de microblogues Weibo (équivalent de Twitter) diverses photos prouvant qu'il possédait au moins 11 montres de marque, pour une valeur cumulée de plusieurs dizaines de milliers d'euros.

Yang Dacai est accusé de posséder des biens fonciers et immobiliers d'une valeur totale de 5,04 millions de yuans (856 000 $) de sources inexpliquées, et d'avoir accepté pour 250 000 yuans de pots-de-vin, a indiqué vendredi la télévision publique CCTV sur son microblogue officiel.

Ce procès intervient alors que les autorités chinoises ont affiché ces derniers mois leur volonté de renforcer la lutte contre la corruption à tous les niveaux de l'administration - une campagne très inégalement appliquée.

D'autres hauts fonctionnaires communistes avaient déjà été dénoncés sur l'internet en raison de leurs montres-bracelets.

En décembre, Yuan Zhanting, maire de Lanzhou, capitale de la province déshéritée du Gansu (nord-ouest), avait été mis en difficulté après la diffusion par un internaute de clichés sur lesquels il arborait au total cinq luxueuses mécaniques, dont une Omega valant 150 000 yuans (25 477 $).

Malgré l'influence croissante des internautes chinois dans la dénonciation des cadres corrompus, la liberté d'expression sur les réseaux sociaux reste cependant étroitement contrôlée, comme en témoigne la récente vague d'arrestations d'utilisateurs de Weibo, accusés de «répandre des rumeurs».