Au moins vingt-cinq personnes ont été tuées et une quarantaine blessées samedi dans deux attentats à la bombe suivis de combats à Quetta, une région du sud-ouest du Pakistan régulièrement ensanglantée par les violences politiques et confessionnelles, selon les autorités locales.

Ces attaques n'ont pas été revendiquées dans l'immédiat, mais la ville a été récemment le théâtre d'attaques sanglantes confessionnelles, les plus meurtrières cette année au Pakistan, menées par des combattants extrémistes sunnites contre la minorité chiite qu'ils jugent hérétique.

Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a «condamné fermement» dans la soirée ces attentats en déplorant «leur caractère particulièrement odieux». Il a «noté avec consternation que la violence contre les femmes et les éducateurs a augmenté ces dernières années, l'objectif étant de priver les filles du droit fondamental à l'éducation».

Les attaques de samedi semblent elles aussi avoir été organisées pour frapper un groupe particulier de personnes et leurs familles, de façon particulièrement cruelle contre une université, puis un hôpital.

Quatorze étudiantes ont été tuées et une vingtaine blessées dans un premier attentat perpétré contre l'autocar qui les transportait, a annoncé le ministre pakistanais de l'Intérieur Chaudhry Nisar.

Peu après, une seconde bombe a explosé à l'hôpital qui accueillait les victimes de la première explosion, tuant au moins onze autres personnes et blessant 17, selon un porte-parole de la force paramilitaire des Frontier Corps,

L'autocar visé par la première bombe transportait des étudiantes de l'université Sardar Bahadur Khan, la seule de la ville qui accueille exclusivement des femmes. Un établissement situé proche de quartiers chiites et qui accueille nombre d'enfants de cette minorité qui représente 20% de la population au Pakistan, pays majoritairement musulman sunnite de 180 millions d'habitants.

Les autorités locales se refusaient toutefois en début de soirée à confirmer qu'il s'agissait d'une attaque confessionnelle.

La bombe, cachée sous le car, a explosé au moment où il quittait l'université, a expliqué à l'AFP Zubair Mahmood, le chef de la police de Quetta.

«Les personnes tuées sont toutes des étudiantes», a précisé l'officier.

Nombre d'étudiantes parmi les blessés sont dans un état critique, grièvement brûlées dans l'incendie qui a ravagé le véhicule après l'explosion, a précisé Fayyaz Sumbal, un autre officier de la police locale.

La deuxième bombe a explosé 90 minutes plus tard au service des urgences du Bolan Medical Complex, le principal hôpital de Quetta, au moment où arrivaient à la fois les victimes du premier attentat et leurs parents et amis, a annoncé la police.

L'hôpital a été au même moment pris d'assaut par un groupe d'au moins cinq hommes armés qui ont ouvert le feu sur les nombreux responsables policiers et de l'administration locale qui avaient afflué sur place après le premier attentat.

La panique s'est emparée de la foule, et au moins un responsable local a été tué et un deuxième blessé dans la fusillade, d'après la télévision publique.

Les combats se sont achevés au bout de deux à trois heures avec la mort de quatre assaillants et l'arrestation du cinquième, ont annoncé les autorités de la province.

Quetta est la capitale du Baloutchistan, région instable frontalière à la fois de l'Iran et de l'Afghanistan et bastion de nombreux groupes criminels et rebelles islamistes ou indépendantistes.

Plus de 6.000 personnes ont péri en six ans dans tout le Pakistan dans une vague d'attentats -commis pour la plupart par des kamikazes- perpétrés par les talibans pakistanais du TTP, alliés à Al-Qaïda ou par d'autres groupes rebelles islamistes. Le TTP reproche à Islamabad son alliance avec les États-Unis dans leur «guerre contre le terrorisme» lancée dans la région après les attentats du 11 septembre 2001.

Les attentats contre les chiites par le Lashkar-e-Jhangvi (LeJ), un groupe sectaire lui aussi allié à Al-Qaïda, ont particulièrement augmenté ces dernières années et atteint cette année un niveau inédit.

Avant les attaques de samedi, Quetta a déjà été cette année le théâtre des deux  attentats anti-chiites les plus meurtriers de l'histoire pakistanaise. Revendiqués par le LeJ, ils ont fait près de 200 morts en début d'année, dont une double attaque contre un club de billard qui a fait 92 morts en janvier.

Les chiites sont accusés par les extrémistes sunnites, dont certains sont réputés très proches de l'Arabie Saoudite, de corrompre l'islam et d'être les agents de l'Iran voisin, première puissance chiite au monde.

Par ailleurs, dans la nuit de vendredi à samedi à Ziarat, à 80 km au sud de Quetta, un groupe armé a attaqué et détruit une maison classée monument historique où le fondateur du Pakistan, Mohammed Ali Jinnah, avait passé ses derniers jours, a annoncé à l'AFP un responsable local. L'attaque qui a fait un mort, le garde du site, a été revendiquée par un mouvement séparatiste local.