Le président américain Barack Obama a salué les réformes politiques et économiques entreprises en Birmanie par son homologue Thein Sein, qui effectuait lundi une visite historique à la Maison-Blanche, mais a réclamé la fin des violences anti-musulmanes dans ce pays.

M. Obama, six mois après s'être rendu à Rangoun, a noté que les relations entre les deux pays s'étaient améliorées grâce «aux actions décisives du président Sein pour faire progresser la Birmanie sur le chemin des réformes politiques aussi bien qu'économiques».

Thein Sein a assuré qu'il voulait poursuivre les réformes démocratiques dans son pays, qui a quitté en l'espace de quelques années son statut de paria alors que la junte militaire semblait desserrer son étreinte sur le pouvoir.

En anglais, M. Obama a prononcé à plusieurs reprises le mot «Myanmar» plutôt que «Burma», recourant donc au nom privilégié par l'armée du pays et qui est de plus en plus souvent utilisé par des responsables américains en signe de courtoisie vis-à-vis du gouvernement.

Il a aussi expliqué que Thein Sein avait effectué de «vrais efforts» pour trouver une solution aux violences ethniques qui affectent le pays, mais a surtout fait mention de la minorité musulmane des Rohingyas.

Le président américain a ainsi fait part de sa «profonde inquiétude au sujet des violences communautaires qui ont visé des groupes musulmans en Birmanie». «Le déplacement de populations, la violence les ciblant doivent cesser», a-t-il insisté.

Thein Sein, dont les propos étaient traduits en anglais par un interprète, a de son côté reconnu que son pays devait faire face à de «nombreuses difficultés», et a exprimé sa reconnaissance à M. Obama pour son investissement dans le dossier birman, qui a selon lui favorisé le processus des réformes en cours.

«Pour que la démocratie se développe dans notre pays, il va nous falloir aller de l'avant, et il va nous falloir entreprendre des réformes politiques et économiques», a-t-il énoncé.

Thein Sein a semblé faire écho aux demandes de M. Obama quelques minutes plus tard, lors d'un discours dans une université de Washington, en souhaitant que les violences communautaires et les discriminations cessent dans son pays et en prônant une «cohésion nationale plus large» sans toutefois faire d'allusion directe aux Rohingyas, une minorité musulmane apatride.

Aucun dirigeant birman n'avait reçu les honneurs de la Maison-Blanche depuis la visite du général Ne Win en 1966, sous la présidence de Lyndon Johnson, quatre ans après le coup d'État militaire qui a plongé la Birmanie dans des décennies d'isolation.

Mais des voix se sont élevées contre cette invitation jugée prématurée, et qui risque de relâcher la pression sur le régime, alors que le bilan de la Birmanie en matière de droits de l'homme est loin d'être satisfaisant et que les forces de l'ordre ont été accusées de passivité lors des récentes violences contre les Rohingyas.

«Le président Obama envoie le message que les crimes contre l'humanité commis par des forces d'État contre des minorités ethniques et religieuses en Birmanie seront ignorés par son administration», a dénoncé Jennifer Quigley, directrice d'US Campaign for Burma.

Thein Sein, ancien Premier ministre de la junte devenu chef de l'État en 2011, a surpris jusqu'aux plus cyniques en libérant, après son accession au pouvoir, des centaines de prisonniers politiques et en laissant entrer au Parlement Aung San Suu Kyi, opposante historique.

S'exprimant dimanche dans les bureaux de la radio Voix de l'Amérique, Thein Sein a indiqué qu'il dirait à M. Obama que les réformes poursuivent leurs cours et qu'il appellerait à la levée de toutes les sanctions économiques que les États-Unis ont pour une large part déjà suspendues.

Les élections de 2015 révèleront la sincérité du régime: les Birmans pourraient décider de porter Aung San Suu Kyi au sommet de l'État et forcer les militaires à céder pacifiquement le pouvoir.