La Birmanie et le Bangladesh ont annoncé mercredi des évacuations de centaines de milliers de personnes, alors que le cyclone Mahasen menace de frapper de vastes zones côtières densément peuplées du Golfe du Bengale.

Le gouvernement birman a indiqué vouloir reloger de façon temporaire plus de 166 000 personnes en État Rakhine (ouest), en majorité des musulmans rohingyas déjà déplacés dans des camps insalubres l'an passé après des violences meurtrières.

Environ 27 000 personnes ont déjà été évacuées, selon les chiffres officiels. «L'armée relogera (les déplacés) dans des écoles», a précisé aux journalistes Aung Min, ministre à la présidence.

Le régime n'a du coup pas confirmé les dates du voyage aux États-Unis du président Thein Sein. Des instituts américains ont affirmé qu'il s'exprimerait lundi à Washington, mais Aung Min a expliqué que le programme serait annoncé «en fonction de ce qu'il adviendra du cyclone».

Simultanément, les autorités au Bangladesh ont «ordonné à la population vivant dans des zones proches du niveau de la mer d'évacuer et d'aller dans des abris anticycloniques», a déclaré à l'AFP Mohammad Abdullah, un administrateur du gouvernement local de Chittagong, la deuxième ville du pays.

Plusieurs centaines de milliers d'habitants étaient concernés. Une décision prise après un bulletin du département météorologique national indiquant que le cyclone pourrait atteindre les côtes jeudi, un jour avant les estimations des Nations unies.

Mahasen perd en intensité, mais reste menaçant, a averti le Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l'ONU (Ocha). Le cyclone «pourrait selon sa trajectoire finale menacer les vies de quelque 8,2 millions de personnes dans le nord-est de l'Inde, le Bangladesh et la Birmanie».

Des responsables locaux bangladais ont indiqué que 113 équipes médicales avaient été mobilisées. «Nous avons mené toutes les préparations nécessaires pour faire face au cyclone», a assuré Mohammed Kamruzzaman, un fonctionnaire en charge du camp de réfugiés rohingyas de Cox's Bazaar.

«Nous avons aussi stocké de la nourriture, placé des équipes médicales et des ambulances en alerte et envoyé les malades et les femmes enceintes des camps vers des hôpitaux».

Mais les Rohingyas, considérés par l'ONU comme une des minorités les plus persécutées du monde, sont plus encore exposés aux vents et à la pluie de l'autre côté de la frontière, en Birmanie, où ils sont environ 800 000 sans droit ni statut.

Des affrontements l'an passé entre bouddhistes de l'ethnie rakhine et rohingyas avaient fait environ 200 morts. Et la région compte actuellement quelque 140 000 déplacés, entassés dans des camps dans des conditions déplorables.

Les évacuations se heurtent à une grande résistance, dans un climat de défiance vis-à-vis des forces de l'ordre, ont constaté des journalistes de l'AFP. Aucun mouvement n'était ainsi constaté dans le camp de déplacés de Mansin, près de la capitale rakhine Sittwe, où vivent environ 2000 personnes.

Et contrairement au Bangladesh, aucun abri anticyclonique n'est disponible.

Kyaw Sein, un père de huit enfants âgé de 62 ans et installé depuis onze mois dans ce camp, refuse de partir. «Nous n'avons aucun espoir (...). Nous n'avons aucune confiance dans le gouvernement», a-t-il expliqué à l'AFP, craignant que le camp soit fermé si les déplacés acceptent de s'installer dans une école.

Aung Min a pour autant laissé entendre qu'ils n'auraient pas le choix de quitter les lieux identifiés comme à risque. Les déplacés «devraient être informés de la loi», a-t-il souligné.

Les deux pays savent parfaitement ce que peut représenter la violence d'un cyclone. En novembre 2007, Sidr avait fait 3300 morts, 800 disparus et 8,7 millions de sinistrés au Bangladesh. Nargis, qui s'était abattu en 2008 sur le delta birman de l'Irrawaddy, avait fait 138 000 morts et disparus.