Le gouvernement koweïtien a approuvé samedi un amendement contesté de la loi électorale et fixé les élections législatives anticipées au 1er décembre, au grand dam de l'opposition qui a dénoncé une «journée noire» et appelé à des manifestations.

«Le cabinet a approuvé un décret sur l'amendement de l'article 2 de la loi électorale portant sur le système de vote et un autre décret invitant les Koweïtiens à élire une nouvelle assemblée nationale le 1er décembre», a annoncé un communiqué publié à l'issue d'une réunion extraordinaire du gouvernement.

Il s'agira des deuxièmes élections législatives cette année et des cinquièmes à se tenir depuis 2006 dans cet émirat pétrolier secoué par des crises à répétition entre l'exécutif et le législatif.

«J'appelle chaque Koweïtien à déchirer la page du 1er décembre de son calendrier et à la jeter à la poubelle. C'est une journée noire dans l'histoire politique du Koweït», a affirmé l'ancien député Mussallam al-Barrak, un dirigeant de l'opposition, sur son compte Twitter.

L'émir, cheikh Sabah al-Ahmad al-Sabah, avait ordonné vendredi au gouvernement de modifier la loi électorale, une décision dénoncée par l'opposition comme une «déclaration de guerre».

L'opposition islamiste et nationaliste a appelé à manifester dimanche, après l'annonce de la décision de l'émir, estimant qu'il s'agissait d'une tentative du pouvoir de faire élire une assemblée qui lui est acquise.

La manifestation, placée sous le slogan «la dignité d'une nation», est prévue tard dimanche devant le Palais Seif abritant les bureaux de l'émir, du prince héritier et du gouvernement situé en bord de mer, selon les organisateurs.

«Force et fermeté»

Dans une ferme mise en garde, le ministère de l'Intérieur a prévenu samedi dans un communiqué qu'il n'autoriserait aucun «sit-in, rassemblement, marche, regroupement ou campement» dans «aucun lieu autre que la place sur laquelle se trouve le Parlement».

Le ministère a également indiqué qu'il réagirait avec «force et fermeté» à «tout acte de violence, d'émeutes, ou tentatives d'incitation à la violence (...) portant atteinte à la sécurité nationale».

Des médias koweïtiens ont rapporté samedi que le ministère de l'Intérieur avait mis en alerte les forces de sécurité et de police.

Dans un communiqué publié à l'issue d'une réunion d'urgence, l'opposition a accusé samedi soir le «régime» de vouloir instaurer «un pouvoir répressif autocratique».

Signé par plusieurs groupes de l'opposition, le communiqué accuse le pouvoir de susciter des crises, d'encourager la dilapidation des deniers publics, d'alimenter les divisions sectaires et tribales et de faire obstacle au développement du pays.

L'émir, qui avait dissous le Parlement le 7 octobre, avait affirmé avoir pris la décision de modifier la loi électorale pour «protéger l'unité nationale», le découpage existant contribuant à diviser le Koweït suivant des lignes confessionnelles et tribales.

Mais sa décision a immédiatement déclenché de vives réactions au sein de l'opposition, dont la majorité des formations et une cinquantaine de députés du Parlement dissous ont décidé de boycotter l'élection, encourageant la population à faire de même.

Les chefs des tribus bédouines, qui forment plus de la moitié de la population autochtone du Koweït, estimée à environ 1,2 million de personnes, ont également appelé au boycottage des élections.

«C'est une déclaration de guerre du régime contre la majorité du peuple koweïtien», a dénoncé l'ancien député islamiste Walid al-Tabtabaï sur Twitter.

La loi électorale, adoptée en 2006 après des manifestations organisées par l'opposition, divise le pays en cinq circonscriptions, chacune devant élire 10 députés.

Selon cette loi, chaque électeur peut voter pour un maximum de quatre candidats.

L'amendement proposé par le gouvernement veut réduire à un ou à deux le nombre de candidats que peut choisir un électeur.

Membre de l'OPEP (Organisation des pays producteurs de pétrole), le Koweït, première monarchie du Golfe à s'être dotée d'un Parlement élu en 1962, connaît des crises politiques à répétition depuis 2006. La dynastie des Al-Sabah règne sur cet émirat depuis plus de 250 ans.