La jeune Pakistanaise Malala Yousufzai, grièvement blessée par les talibans pour avoir défendu le droit à l'éducation des filles, a été transférée par avion lundi matin vers la Grande-Bretagne afin d'y recevoir des soins médicaux spécialisés de longue durée.

« Le Pakistan a organisé avec les Émirats arabes unis le transport de Malala par avion médical vers la Grande-Bretagne », a indiqué dans un communiqué l'armée pakistanaise, qui s'occupait d'elle depuis l'attaque dont elle a été victime.

Son départ n'a été annoncé qu'après le décollage de l'avion par mesure de sécurité, car « des insurgés avaient menacé de l'attaquer à nouveau », a précisé le ministre de l'Intérieur Rehman Malik.

Malala Yousufzai, 14 ans, a été blessée mardi dernier par balle à l'épaule et à la tête par les talibans pakistanais à Mingora, principale ville de la vallée de Swat (nord-ouest).

Deux hommes armés avaient intercepté son bus scolaire après la sortie des cours. L'un d'eux était entré dans le car et avait ouvert le feu sur l'adolescente qui se trouvait avec des camarades et son père, un enseignant lui aussi connu dans la vallée de Swat comme un farouche opposant aux talibans.

L'attaque a été revendiquée par les insurgés du Mouvement des talibans du Pakistan (TTP), allié au réseau Al-Qaïda, qui ont affirmé avoir pris pour cible Malala pour « son rôle de pionnière » dans la défense de l'éducation des jeunes filles et ses critiques musclées à l'endroit des talibans.

Malala avait été la première récipiendaire du prix national pour la paix créé l'an dernier par le Pakistan après s'être fait connaître à l'âge de 11 ans seulement en dénonçant sur un blogue de la BBC les violences commises par les fondamentalistes talibans dans sa région entre 2007 et 2009.

Les autorités pakistanaises ont promis une récompense de 100 000 $ pour toute information permettant d'arrêter les auteurs de l'attaque et brièvement arrêté plusieurs dizaines de personnes dans le cadre de l'enquête. Aucune arrestation de coupables potentiels n'a toutefois été annoncée.

La jeune fille avait été transportée par hélicoptère de la vallée de Swat à Peshawar, grande ville du nord-ouest, puis dans le principal hôpital militaire du pays à Rawalpindi, ville jumelle de la capitale Islamabad.

Dimanche, l'armée avait fait état de « progrès réguliers et satisfaisants » dans son rétablissement. Les médecins ont arrêté la respiration artificielle pour un bref essai « réussi », mais ils ont ensuite rebranché le système « pour éviter de la fatigue à la patiente », selon l'armée.

On ignore encore si elle aura des séquelles physiques à long terme. Des médecins spécialistes pakistanais et étrangers estiment qu'elle a désormais besoin « de soins prolongés afin de se remettre entièrement sur les plans physiques et psychologiques », a indiqué l'armée.

Des os endommagés du crâne de l'adolescente devront aussi être traités ou remplacés, a souligné l'armée qui évoque une « réadaptation à long terme, incluant des soins neurologiques prolongés ».

Les autorités pakistanaises se sont engagées à payer les dépenses - transport, soins, etc. - de l'adolescente qui devrait être traitée à l'Hôpital Reine Elizabeth à Birmingham, un centre de santé spécialisé où sont aussi soignés les soldats britanniques grièvement blessés en Afghanistan.

Le chef de la diplomatie britannique William Hague a condamné l'attaque contre la jeune Malala dont le combat pour l'éducation est « un exemple pour nous tous » à travers le monde, a-t-il dit en marge d'une réunion au Luxembourg.

« Le dégoût général qu'a inspiré cette attaque lâche et sa condamnation montrent bien que la population pakistanaise ne perdra pas son combat contre les terroristes », a-t-il ajouté.

L'attentat a suscité une vive émotion et fait surgir un fort sentiment anti-taliban dans de nombreuses régions du Pakistan, pays de plus de 180 millions d'habitants en proie à une montée en puissance du fondamentalisme religieux.

Des milliers de personnes se sont rassemblées ce week-end à Karachi, la principale ville du sud, pour soutenir la jeune fille. Des prières spéciales ont été prononcées à son intention dans des mosquées et des écoles à travers le pays et même en Afghanistan voisin.

Les condamnations de l'attentat ont été nombreuses à l'étranger. Le président Barack Obama a qualifié l'agression de « barbare et lâche ».