La plus importante panne du monde. C'est ainsi que les médias indiens ont décrit la noirceur qui est descendue hier sur le nord du pays, touchant plus de 680 millions de personnes. En fin de soirée, une dépêche assurait toutefois que tous les réseaux électriques avaient été réparés.

Hier, Barun Mitra a mis deux heures à sortir du centre-ville de New Delhi. À cause d'une panne électrique monstre, ni les feux de circulation ni le métro ne fonctionnaient.

Pour le politologue du Liberty prônant la libéralisation économique, c'est la preuve que Institute, groupe de réflexion la politique électrique indienne doit être changée. Pénuries de charbon, sécheresse sapant le potentiel hydroélectrique, vol d'électricité et impossibilité politique d'en augmenter le coût ont amené le pays au bord du gouffre.

Le coût des pannes électriques atteint un ou deux points de pourcentage de croissance du produit national brut (PNB), selon SP Kothari, professeur de gestion et membre du Groupe stratégique sur l'Inde du Massachusetts Institute of Technology. «On ne parle plus simplement des usines et des bureaux qui sont paralysés. Le manque d'air conditionné diminue la productivité, comme dans le sud des États-Unis avant les années 60.»

Le réseau électrique indien est connu par tous les spécialistes du domaine, selon François Bouffard, ingénieur électrique à l'Université McGill. «Leur méthode est assez originale, dit M. Bouffard. Ici, on limite les variations de fréquence à 0,2 Hz. En Inde, ça va jusqu'à 1 Hz parce qu'il n'y a pas de régulateurs de fréquence automatiques. Les sociétés se fient aux fluctuations de prix: quand ils augmentent trop rapidement, elles font des ajustements. Mais quand la fréquence varie trop, les alternateurs se mettent hors ligne pour se protéger.» La Banque mondiale a récemment lancé son cinquième programme de modernisation du réseau électrique indien, au coût de 1 milliard US.

La sécheresse qui frappe l'Inde cet été a non seulement vidé les réservoirs hydroélectriques, mais aussi ralenti les centrales au charbon, qui ont besoin d'eau pour produire de la vapeur. «Le gouvernement dépense des milliards pour garder le prix de l'électricité et de l'essence bas, déplore M. Kothari. Pendant ce temps, près de la moitié des résidences ne sont pas branchées au réseau.»

Barun Mitra a récemment souligné dans le Wall Street Journal que l'État de Gujarat, qui n'est pas touché par les pannes, a construit un réseau électrique parallèle plus cher mais plus fiable. «Les fermiers s'y sont branchés. C'est la voie de l'avenir.»