L'artiste contestataire Ai Weiwei a annoncé mercredi qu'il n'avait pas eu le droit d'accéder au tribunal qui étudiait ce même jour sa plainte contre un colossal redressement fiscal le visant et destiné selon lui à le réduire au silence.                                

« Ils (les policiers) me l'ont clairement fait comprendre en me disant : «Si vous tentez de vous rendre au tribunal, vous n'y parviendrez jamais», a déclaré à l'AFP le dissident, qui ne ménage pas ses critiques contre le Parti communiste chinois.

Le fisc chinois a imposé un redressement de 15 millions de yuans (2,2 millions de dollars) à Fake Cultural Development Ltd, une entreprise créée par l'artiste, mais enregistrée au nom de sa femme.

Après avoir enduré une longue détention l'an dernier dans un lieu tenu secret, déjà au motif de cette évasion fiscale présumée, Ai Weiwei avait décidé de porter plainte contre la direction des impôts de Pékin.

D'où l'audience au tribunal prévue ce mercredi. Ouverte en début d'après-midi, elle se poursuivait plusieurs heures plus tard dans un tribunal entouré de très nombreux policiers en uniforme et en civil.

Selon Ai, ce redressement fiscal n'est qu'une mesure politique destinée à le « briser » et les autorités lui refusent de surcroît des moyens équitables de se défendre.

« Comment est-il possible d'accuser quelqu'un sans lui accorder le droit de poser des questions (sur la procédure qui le vise)? », a demandé l'artiste touche-à-tout. S'il était absent au tribunal, sa femme a pu y défendre leurs intérêts communs, a-t-il précisé.

Tandis que l'audience se poursuivait, Ai a déclaré à l'AFP, qui l'interrogeait dans son atelier de Pékin : « je n'ai vraiment aucun espoir (...), mais c'est juste un combat ».

Alors que la police avait éloigné les amis d'Ai et de nombreux journalistes des abords du tribunal, le plasticien s'est dit « très reconnaissant de voir les gens porter de l'attention » à ses nouveaux démêlés avec les autorités chinoises.

Ces gens-là « sont ceux qui pensent que cette société a besoin de justice », a-t-il dit. « Bien sûr c'est dangereux pour eux d'être là-bas (à l'extérieur du tribunal) la police les contrôle et leur pose des questions ».

Ai avait été détenu dans un lieu inconnu de début avril à fin juin 2011, ce qui avait soulevé une vague d'indignation à travers le monde. Il vit depuis sous surveillance, sans pouvoir quitter Pékin. Une mesure qui doit être levée ce vendredi.

L'artiste polyvalent, qui a participé à la conception du célèbre Nid d'oiseau, le stade des Jeux olympiques de Pékin en 2008, avait notamment enquêté sur l'effondrement d'écoles lors du séisme de 2008 dans la province du Sichuan et sur un incendie qui avait fait des dizaines de victimes en novembre 2010 à Shanghai.