Pékin et Washington négociaient mardi un accord permettant au dissident chinois Chen Guangcheng de quitter la Chine pour les États-Unis avec sa famille après son évasion de son domicile où il était assigné à résidence, a affirmé un militant des droits de l'homme.

Pékin et Washington voudraient régler cet épineux dossier avant l'arrivée dans la capitale chinoise de la secrétaire d'État américaine Hillary Clinton et du secrétaire au Trésor Timothy Geithner pour une importante rencontre bilatérale -le dialogue stratégique et économique- prévue jeudi et vendredi.

Selon Bob Fu, le président de l'organisation chrétienne China Aid basée au Texas, Chen était dans un premier temps réticent à l'idée de quitter la Chine, mais il a fini par s'y résoudre à condition que sa famille l'accompagne.

«La situation a changé au cours des derniers jours. Il comprend qu'il lui est désormais impossible de retourner à Dongshigu», dans la province du Shandong (est), d'où il s'est échappé le 22 avril, a-t-il affirmé à l'AFP lors d'un entretien au téléphone.

«Il ne partira pas sans sa famille -s'il l'avait envisagé, il serait déjà parti. Le scénario le plus raisonnable est la négociation d'un accord rapide qui permette à la Chine de sauver la face», a-t-il dit.

Cet accord consisterait par exemple à autoriser la famille Chen à se rendre aux États-Unis pour raisons médicales, a précisé Bob Fu, qui affirme détenir ces informations de sources officielles en Chine et à Washington.

Hilary Clinton en route

La secrétaire d'État américaine Hillary Clinton s'est envolée pour Pékin dans la nuit de lundi à mardi pour une visite en Chine singulièrement compliqués par la présence de Chen Guangcheng à l'ambassade des États-Unis.

Compte tenu du décalage horaire, Mme Clinton, qui a quitté Washington peu avant minuit, n'est pas attendue avant mercredi matin dans la capitale chinoise, où elle doit tenir jeudi et vendredi, en compagnie de son collègue du Trésor Timothy Geithner, une nouvelle session du «dialogue stratégique et économique» entre les deux pays.

Mais cette réunion bilatérale prévue de longue date a été perturbée par l'évasion le 22 avril de l'avocat aveugle Chen Guangcheng.

Lors d'une conférence de presse à Washington, Mme Clinton s'est refusée «pour l'heure» à tout commentaire sur l'affaire Chen mais assuré qu'elle soulèverait la question des droits de l'homme pendant sa visite.

En novembre, Mme Clinton avait cependant été beaucoup plus claire dans son soutien à Chen Guangcheng, qu'elle avait nommément cité pour dénoncer son placement en résidence surveillée.

Chen Guangcheng, pourfendeur des abus de la politique de l'enfant unique en Chine et des expropriations, s'est échappé de son domicile du Shandong où il était assigné à résidence depuis 19 mois.

Il serait depuis réfugié à l'ambassade des États-Unis, selon un de ses compagnons de route, le dissident Hu Jia, mais ni Pékin ni Washington n'ont confirmé.

Dans un message adressé vendredi dernier par internet au premier ministre Wen Jiabao, Chen se plaint des brutalités physiques et du harcèlement des nervis du régime dont il a été victime ainsi que sa famille depuis le début de son assignation officieuse à résidence.

Ce militant des droits civiques de 40 ans avait été libéré de prison en septembre 2010 après avoir purgé une peine de plus de quatre ans de réclusion, puis confiné dans sa maison de Dongshigu, gardée par des dizaines d'hommes de main du régime.

Des membres de sa famille, mais aussi des amis militants soupçonnés de l'avoir aidé dans sa fuite ont été arrêtés, selon des associations de défense des droits de l'homme.