Le premier ministre britannique David Cameron en visite en Birmanie, a proposé vendredi de suspendre les sanctions contre le régime pour soutenir ses réformes, recevant le soutien en ce sens, pour la première fois, de la chef de file de l'opposition Aung San Suu Kyi.

Cameron, premier chef de gouvernement occidental à se rendre dans le pays asiatique depuis le coup d'État militaire de 1962, a rencontré le président Thein Sein à Naypyidaw, puis la lauréate du prix Nobel de la paix à Rangoun.

Et il a apporté un soutien fort, mais calculé aux réformateurs birmans.

«Il est bon de suspendre les sanctions contre la Birmanie, de les suspendre, pas de les lever», a-t-il déclaré, soulignant que l'embargo sur les armes ne devait pas être concerné.

«Il est important d'envoyer un signal que nous voulons aider les changements qui peuvent apporter un accroissement de la liberté, des droits de l'homme et de la démocratie dans votre pays».

«Évidemment, nous devons répondre avec prudence, avec attention. Nous devons toujours rester sceptiques (...) parce que nous voulons savoir que ces changements sont irréversibles».

Debout à ses côtés sur le perron de sa maison familiale, Suu Kyi, dont les analystes estiment qu'elle conserve une immense influence en Occident, a appuyé la méthode de son interlocuteur, après avoir jusqu'à présent plaidé pour le maintien des sanctions.

«Je soutiens l'idée de la suspension des sanctions plutôt que leur levée», a-t-elle expliqué, en se déclarant «par nature, une optimiste prudente».

«Nous avons encore un long chemin à parcourir, mais nous pensons que nous y parviendrons».

La suspension des mesures restrictives, en place depuis la fin des années 90, permettra selon elle d'envoyer un message clair aux conservateurs «que s'ils se mettent en travers des réformateurs, les sanctions pourraient revenir».

Quelques heures auparavant, David Cameron avait rencontré le président et ancien général Thein Sein, crédité dans le monde entier de l'impulsion réformatrice qui a saisi le pays depuis son arrivée au pouvoir il y a un an, après l'auto-dissolution de la junte.

«Nous sommes encouragés et heureux de la reconnaissance que vous avez faites des efforts pour promouvoir la démocratie et les droits de l'homme en Birmanie», a déclaré Thein Sein en accueillant son prestigieux visiteur, représentant de l'ancienne puissance coloniale.

De nombreuses personnalités occidentales se sont récemment succédé en Birmanie, notamment la secrétaire d'État américaine Hillary Clinton en décembre. Mais Cameron est le premier de ce niveau à s'y présenter depuis le putsch qui avait plongé le pays dans la dictature pour un demi-siècle.

Depuis un an, le régime dit «civil» n'a cessé de surprendre: il a libéré de nombreux prisonniers politiques, ouvert des négociations avec les groupes ethniques rebelles puis organisé les élections partielles du 1er avril.

La Ligue nationale pour la démocratie (LND) de Suu Kyi y a remporté 43 sièges sur les 44 qu'elle briguait, devenant la première force d'opposition du pays avec quelque 10% des députés. Un an et demi auparavant, elle avait boycotté les élections controversées de novembre 2010.

Le processus a été unanimement salué par la communauté internationale.

Mais Cameron a appelé à la poursuite des efforts, réclamant une «solution politique» aux conflits ethniques dans les mois et années à venir, et portant déjà son regard vers les «élections législatives de 2015», le prochain grand rendez-vous de la démocratie birmane.

Les États-Unis se sont déjà engagés à «alléger» les restrictions sur les investissements et à nommer rapidement un ambassadeur. Un geste réclamé jeudi par les ministres des Affaires étrangères du G8, «afin d'aider à ancrer les réformes de ce pays et à faire en sorte qu'il s'intègre dans les processus politiques régionaux et internationaux».

Quant à l'UE, une décision formelle est attendue le 23 avril à Luxembourg, au terme d'une réunion des ministres des Affaires étrangères. Le jour même où Suu Kyi siégera au Parlement pour la première fois.