Les relations entre les États-Unis et la Corée du Nord ont enregistré un net réchauffement avec l'accord donné mercredi par Pyongyang à un moratoire sur ses activités nucléaires en échange d'une aide alimentaire américaine, deux mois après la mort de Kim Jong-Il.

Selon le département d'État américain, la Corée du Nord a accepté la mise en place d'un moratoire sur les lancements de missiles à longue portée, sur les essais nucléaires et les activités d'enrichissement d'uranium menées à son usine de Yongbyon. L'annonce a été confirmée par l'agence de presse officielle nord-coréenne.

La Corée du Nord a également accepté le retour d'inspecteurs de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) pour superviser le moratoire sur l'enrichissement. L'agence a salué un «important pas en avant». «Encouragé», le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-Moon a appelé à une «dénucléarisation vérifiable» de la péninsule.

Les États-Unis se sont engagés à faire avancer le dossier concernant la livraison de 240 000 tonnes d'assistance alimentaire. Le programme prévoit de la nourriture pour les jeunes enfants et les femmes enceintes, une population délaissée par le régime, selon un responsable américain.

Prudente, la secrétaire d'État américaine Hillary Clinton a parlé d'un «premier pas modeste dans la bonne direction». «Nous regarderons bien sûr très attentivement ce que feront les nouveaux dirigeants nord-coréens et nous les jugerons sur leurs actes», a-t-elle déclaré au Congrès.

Même son de cloche à la Maison Blanche qui a évoqué «un premier pas positif». «Mais nous devons nous concentrer aussi bien sur les actes que sur les accords et les déclarations», a précisé le porte-parole Jay Carney.

L'opposition américaine a mis en garde contre les revirements de Pyongyang, qui avait déjà accepté en 2007 de démanteler son programme nucléaire.

«La promesse nord-coréenne ne peut être prise pour argent comptant», a déclaré la présidente de la commission des Affaires étrangères de la Chambre des représentants, Ileana Ros-Lehtinen. Les Nord-Coréens «vont certainement continuer leur programme clandestin sous notre nez».

La Chine de son côté s'est félicitée de l'annonce du moratoire et de «l'amélioration des relations entre la Corée du Nord et les États-Unis».

Ces nouvelles avancées interviennent après des pourparlers en Chine entre Washington et Pyongyang visant à reprendre des négociations à Six (les deux Corées, Chine, Japon, Russie, États-Unis) sur la dénucléarisation de la péninsule, au point mort depuis décembre 2008.

Ces discussions étaient les premières entre les deux pays depuis la mort du dirigeant nord-coréen Kim Jong-Il en décembre, remplacé par son fils Kim Jong-Un.

Responsables et experts américains se gardent bien de miser sur d'hypothétiques dispositions pacifistes de ce dernier qui, contrairement à son père et à son grand-père, s'est frotté à l'Occident pendant ses études en Suisse.

«Ce rebondissement semble suggérer que le nouveau gouvernement est ouvert aux réformes et qu'il est, en tout cas, beaucoup moins hostile que par le passé», a estimé Bruce Cumings de l'Université de Chicago.

En 2009, la Corée du Nord avait expulsé les inspecteurs de l'AEIA puis procédé à un essai nucléaire, le second depuis 2006.

En novembre 2010, elle avait dévoilé son usine d'enrichissement d'uranium, nouveau moyen pour le régime communiste de développer l'arme nucléaire en parallèle à un programme de fabrication de bombes au plutonium.

Pyongyang a réaffirmé mercredi que les deux parties avaient reconnu l'accord de 2005 entre les Six comme base de la reprise des pourparlers. Cet accord prévoit la dénucléarisation de la péninsule en échange d'une aide économique, en particulier énergétique.

En 2005, les Six avaient accepté de «respecter» la volonté du Nord de se doter de réacteurs à eau légère pour se fournir en électricité, moins susceptibles d'être détournés à des fins militaires.

Pyongyang a par ailleurs confirmé que les deux parties s'étaient engagées à reconnaître l'armistice de 1953 entre les deux Corées comme «pierre angulaire de la paix et de la stabilité dans la péninsule coréenne jusqu'à la conclusion d'un traité de paix».

Alors que des manoeuvres militaires conjointes entre Américains et Sud-Coréens ont démarré lundi, la porte-parole de la diplomatie américaine a assuré que les «Etats-Unis n'avaient pas d'intention hostile envers la Corée du Nord».