Le président du Kazakhstan a décrété d'état d'urgence et instauré le couvre-feu samedi à Janaozen, une ville de l'ouest de cette ancienne république soviétique d'Asie centrale où des émeutes ont fait la veille au moins 11 morts, beaucoup plus selon l'opposition.

Samedi soir, un site internet d'opposition, socdeistvie.info, a affirmé que des tirs en rafales étaient entendus dans la ville, ainsi que dans une localité des environs, Chepti, dont les habitants auraient «arrêté deux trains et commencé de brûler les wagons».

Dans une video en ligne, présentée comme étant celle d'une conversation par téléphone avec un habitant, et entrecoupée de bruits de tirs, un homme s'exprime alternativement en russe et en kazakh.

«Les gens ont été forcés à rentrer chez eux. Il y a encore quelques foyers, les gars combattent encore un peu», dit-il.

Il n'était pas possible de vérifier cette information dans l'immédiat, les communications étant coupées avec Janaozen.

Dans un décret publié plus tôt dans la journée, le président Noursoultan Nazarbaïev a instauré l'état d'urgence et le couvre-feu dans la ville jusqu'au 5 janvier «à la suite des troubles massifs à l'ordre public le 16 décembre».

Le président Nazarbaev, qui dirige d'une main de fer depuis l'époque soviétique ce pays riche en ressources minérales et en hydrocarbures, et considéré jusqu'à présent comme le plus stable de la région, a affirmé dans une déclaration également publiée samedi que la situation était «sous contrôle».

Un porte-parole du Parquet général kazakh a cependant indiqué que la situation s'était également tendue dans une autre ville de l'ouest du pays, Aktaou.

«Il y a eu hier (vendredi) certains troubles à Aktaou, des gens se sont rassemblés, mais après l'intervention du procureur et de la direction de la police de la ville, ils se sont dispersés», a dit ce porte-parole, Nourdaoulet Souindikov, cité par Interfax.

Dans un communiqué, l'ONG de défense des droits de l'Homme Human Rights Watch a affirmé de son côté qu'une centaine de personnes avaient été arrêtées dans cette ville, puis libérées dans la nuit.

D'autres informations du site socdeistvie.info ont fait état samedi d'un nouveau rassemblement d'un millier de personnes dans cette ville, sans qu'il soit possible de vérifier dans l'immédiat.

Le président Nazarbaïev a souligné dans sa déclaration qu'il ne tolèrerait aucun trouble dans le pays.

«L'État empêchera dans toute la rigueur de la loi toute tentative de nuire à la tranquillité et à la sécurité de nos citoyens», a-t-il déclaré, «les coupables seront punis».

Vendredi, de violents heurts impliquant apparemment des milliers de grévistes du secteur pétrolier réclamant des hausses de salaires, et qui s'en étaient pris aux préparatifs de l'anniversaire de l'indépendance du Kazakhstan sur la place centrale de Janaozen, ont provoqué la mort de 11 personnes après l'intervention des forces de l'ordre.

Plusieurs grèves ont eu lieu ces derniers mois dans cette région qui regorge de pétrole, située sur la rive orientale de la mer Caspienne.

Selon plusieurs médias d'opposition, des manifestants employés de la société pétrolière Ozemunaigaz s'en sont pris à la tribune montée à l'occasion des festivités, après quoi les forces de l'ordre ont chargé et ouvert le feu.

Le Parquet général kazakh a cependant fait état samedi d'un dernier bilan officiel de 11 morts, 86 blessés dont 6 policiers, et 70 personnes interpellées.

Le représentant du Parquet, dans un communiqué, a affirmé que les troubles avaient été organisés par des «voyous» qui «se cachaient derrière les grévistes».

Selon lui, les forces de police ont été contraintes de faire usage de leurs armes après avoir essuyé «des coups de feu de la part des participants des troubles».

Des informations diffusées par des ONG russes de défense des droits de l'homme et l'opposition kazakhe, qui ne donnent pas de sources, font pour leur part état de «plusieurs dizaines de morts».

Des témoignages diffusés par la chaîne de télévision indépendante kazakh K+, basée au Kirghizstan voisin, ont fait état d'une cinquantaine de morts et de l'emploi d'armes automatiques contre la foule.