Le président pakistanais Asif Ali Zardari, sorti mercredi de l'hôpital de Dubaï où il a subi des examens après une attaque cardiaque mineure, n'avait pas voulu être hospitalisé dans son pays, car sa vie y était menacée, a déclaré le premier ministre.

Le brusque départ de M. Zardari à Dubaï le 6 décembre et son hospitalisation immédiate dans cette ville des Émirats arabes unis alimentent, depuis, les rumeurs sur l'éventuelle démission de cet homme de plus en plus impopulaire, accusé de corruption et récemment soupçonné d'avoir appelé les États-Unis à l'aide pour limiter l'influence de la toute-puissante armée pakistanaise.

Élu en 2008 parce que son épouse, l'ex-première ministre Benazir Bhutto, venait d'être assassinée dans un attentat-suicide attribué aux talibans alliés à Al-Qaïda, M. Zardari a plusieurs fois mentionné, depuis, le fait qu'il se sentait menacé, assurant toutefois qu'il n'avait «pas peur de mourir».

Mais, depuis quelques mois, il ne sortait quasiment jamais plus du palais présidentiel, sauf pour se rendre à l'étranger.

Le chef de l'État, dont le père était hospitalisé à Islamabad depuis un mois et demi, «ne lui a jamais rendu visite parce que sa vie était menacée», a déclaré mercredi soir le premier ministre Yousuf Raza Gilani devant le Sénat.

Les forces de sécurité avaient «arrêté certaines personnes qui voulaient l'attaquer» s'il se rendait au chevet de son père, a poursuivi le chef du gouvernement, sans préciser qui étaient ces personnes.

Puis, M. Zardari est «tombé malade» et «c'est la raison pour laquelle il n'a pas voulu aller dans cet hôpital» d'Islamabad, «il ne voulait aller dans aucun hôpital du Pakistan à cause des menaces sur sa vie, alors nous l'avons persuadé (...), sa famille l'a convaincu d'aller à Dubaï», a conclu M. Gilani.

Mercredi, le porte-parole du président, Farhatullah Babar, a annoncé que M. Zardari était sorti de l'hôpital américain de Dubaï et qu'il s'était rendu dans sa maison de Dubaï afin de s'y reposer.

«Le président Asif Ali Zardari a été autorisé à quitter l'hôpital et est parti pour sa résidence à Dubaï», a indiqué le porte-parole, cité par l'agence de presse pakistanaise APP.

L'hospitalisation de M. Zardari avait alimenté les rumeurs de démission, voire de «coup d'État en douceur». Il est la cible régulière d'accusations de corruption et est soupçonné par l'opposition et certains médias d'avoir sollicité -juste après qu'un commando américain eut tué Oussama ben Laden le 2 mai dans un raid clandestin au Pakistan- le soutien des États-Unis pour tenter de limiter le pouvoir de l'armée. Si cette accusation s'avérait fondée, cela relèverait du crime de «haute trahison», ont averti l'opposition et des médias.

Depuis son indépendance en 1947, le Pakistan a vécu la moitié de son histoire sous la férule de généraux putschistes et le reste sous des gouvernements civils toujours étroitement encadrés par les chefs militaires. Celui de M. Zardari ne fait pas exception. Selon les experts, aucune décision majeure dans la seule puissance militaire nucléaire du monde musulman, alliée aux États-Unis depuis fin 2001 dans leur «guerre contre le terrorisme», ne se prend sans l'aval de l'armée, quand elle ne les dicte pas.

Le porte-parole de M. Zardari a assuré mercredi soir à l'AFP que le chef de l'État n'avait aucunement l'intention de démissionner et rentrerait au Pakistan dès que les médecins l'y autoriseraient.

Il «a été admis le mardi 6 décembre, se plaignant principalement d'un engourdissement du bras droit, d'élancement et d'une perte passagère de conscience de quelques secondes», ont écrit les médecins de l'hôpital américain dans leur rapport rendu public mercredi par le gouvernement.

«En raison d'antécédents de maladie cardiaque, des examens cardiaques et neurologiques ont été réalisés», ont-ils ajouté. «Tous les résultats étaient dans les normes (...) et il doit quitter l'hôpital pour se reposer chez lui (...), afin de poursuivre son traitement normal pour le coeur», ont conclu les praticiens.

M. Zardari, 56 ans, souffre depuis des années de problèmes cardiaques.