Le parti historique de l'opposante birmane Aung San Suu Kyi, la Ligue nationale pour la démocratie (LND), a été officiellement reconnu comme légal par la Commission électorale, a indiqué mardi le quotidien officiel New Light of Myanmar.

La LND, qui avait boycotté les élections de novembre 2010, est désormais en mesure de présenter des candidats, dont la lauréate du prix Nobel de la paix elle-même, aux législatives partielles attendues d'ici quelques mois.

«La commission électorale de l'Union a autorisé la formation» de la LND «dès lors que le dossier d'enregistrement comme parti politique» déposé le 25 novembre à Naypyidaw est «en accord avec la loi», a indiqué le journal anglophone.

Le parti, au sein duquel l'opposante a fait toute sa carrière politique depuis 1988, avait été dissous en mai 2010 par la junte alors au pouvoir, suite à son annonce du boycottage du scrutin de novembre suivant.

Suu Kyi a longtemps défendu cette stratégie, refusant de cautionner un scrutin qualifié de «mascarade» par l'Occident.

Depuis, les militaires ont mis en place un régime «civil» certes toujours sous leur contrôle, mais à la tête duquel le président Thein Sein a multiplié les réformes, espérant sortir de l'isolement international qui épuise le pays.

Un amendement aux lois électorales a permis de modifier deux points sensibles. Les détenus peuvent désormais appartenir à un parti, une façon pour la LND de ne pas oublier ses membres encore derrière les barreaux. Et le pouvoir admet les discussions sur la Constitution de 2008, adoptée dans les ruines du cyclone Nargis et toujours contestée par les cadres du parti.

La LND a indiqué mardi ne pas encore avoir reçu l'accord formel de la commission. Certains des 21 membres fondateurs officiels vont se rendre à Naypyidaw pour les dernières démarches, a précisé à l'AFP un de ses porte-parole.

«Cette autorisation était ce que nous attendions», s'est réjoui Nyan Win.

Suu Kyi, 66 ans, que les Birmans appellent respectueusement la «Dame», va donc pouvoir entrer elle même dans le combat électoral pour la première fois de sa vie.

Au début du mois, lors d'une visite historique de la secrétaire d'État américaine, Hillary Clinton, elle s'était déclarée «confiante» dans le fait que son pays était sur «la voie de la démocratie».

En 1990, la LND avait humilié le régime militaire en remportant 392 des 485 sièges à pourvoir. Mais les généraux avaient refusé de reconnaître le résultat. En passe de devenir une icône mondiale de la démocratie, Suu Kyi était alors déjà privée de liberté et l'est restée pendant la majorité du temps depuis. Elle n'a été libérée que le 13 novembre 2010.

La LND, désormais tournée vers son avenir légal, s'est dotée d'un nouveau logo électoral diffusé lundi dans la presse locale. Autrefois identifiable à un chapeau de bambou, elle sera désormais reconnaissable à un paon de combat qui tend le cou vers une étoile blanche, symbole de la révolution.

Marty Natalegawa, ministre des Affaires étrangères de l'Indonésie, qui occupe la présidence tournante de l'Association des Nations d'Asie du Sud-Est (ASEAN), a salué mardi la légalisation de la LND.

La Birmanie a récemment obtenu du bloc régional qu'elle en assume la présidence en 2014, ce qui consacrera son retour sur la scène internationale, puisqu'elle devra organiser un sommet avec les grandes puissances du continent et les États-Unis.

«Maintenant qu'ils se préparent à présider l'ASEAN, ils vont vraiment être sous les feux de l'actualité plus qu'aucun autre pays» de la région, a estimé le ministre, estimant que cette pression pousserait le gouvernement à poursuivre ses réformes.