L'échange de courriels à saveur romantique entre un député conservateur et une reporter chinoise doit être pris au sérieux puisque la Chine considère les politiciens comme des cibles de choix et que les journalistes ne sont pas toujours qui ils prétendent être, a affirmé mercredi un ancien espion chinois.

Li Fengzhi a soutenu que des agents du ministère chinois de la Sécurité d'État, où il travaillait avant de faire défection, s'intéressent souvent aux politiciens.

L'ancien agent commentait le dossier du député conservateur Bob Dechert, qui a reconnu avoir fait parvenir des courriels à teneur sentimentale à une correspondante de l'agence de presse chinoise Xinhua, qui est contrôlée par Pékin.

Bob Dechert est secrétaire parlementaire au ministère des Affaires étrangères.

Dans le cadre d'une conférence sur l'espionnage corporatif, Li Fengzhi a affirmé que «le gouvernement canadien devrait se préoccuper de ce genre de question». L'allocution de M. Li a été transmise par l'entremise d'un service de téléphonie sur Internet, à partir d'un endroit qui avait été gardé secret.

Les journalistes chinois ne sont pas tous des espions, mais il n'en demeure pas moins que la Chine considère les politiciens comme des cibles privilégiées, a-t-il indiqué.

Car cibler des politiciens est «la façon normale de faire le boulot» pour les espions chinois, a affirmé M. Li, selon qui ceux-ci se présentent souvent comme des journalistes lorsqu'ils sont dépêchés à l'étranger.

L'année dernière, on avait reproché au dirigeant du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) d'avoir laissé entendre que des agents chinois influençaient certains politiciens provinciaux.

Dick Fadden avait par la suite minimisé ses propos, mais la question a refait surface lorsque les échanges de courriel entre Bob Dechert et la correspondante Shi Rong ont été rendus publics l'été dernier.

Shi Rong a depuis été rapatriée à Pékin.

Le conférencier a suggéré que le SCRS en savait peut-être plus sur le dossier qu'il ne le laisse entendre. Ni le SCRS, ni la Gendarmerie royale du Canada n'ont souhaité formuler de commentaires à ce sujet.

Li Fengzhi, qui a fait défection en 2009, a reconnu qu'il ne disposait d'aucune information spécifique en ce qui a trait à l'histoire de Bob Dechert et de Shi Rong. Il a cependant signalé qu'il avait lu de nombreux textes à ce sujet avant son allocution, qui a eu lieu dans une salle de bal de Gatineau remplie à pleine capacité.

Le premier ministre Stephen Harper, qui devrait effectuer un voyage officiel en Chine l'an prochain afin de consolider les liens d'affaires entre les deux pays, a déjà déclaré que selon lui, Bob Dechert n'a pas mis en péril les intérêts du Canada.

Photo: Mike Blanchfield, PC

L'ex-espion chinois Li Fengzhi a donné une conférence vidéo mercredi.