La première ministre thaïlandaise a été chahutée jeudi par des habitants du nord de Bangkok contraints de vivre dans l'eau depuis plus d'une semaine, alors qu'un cinquième de la ville est désormais inondé et que la crise est susceptible de durer encore des semaines.

Yingluck Shinawatra, soumise à une épreuve politique très compliquée alors qu'elle n'est au pouvoir que depuis le mois d'août, a rendu visite à des habitants du district de Don Mueang, particulièrement touché.

«Je ne sais pas si vous êtes venue ici pour aider ou pour aggraver la situation», a crié une femme, alors que les kits de survie n'étaient pas suffisants pour qu'elle puisse en obtenir.

«Vous êtes ici juste pour vous amuser, pas vraiment pour aider. Alors, ne revenez pas», a également lancé un vieux monsieur, dans ce quartier désormais submergé par une eau putride, mais dont les habitants rechignent à partir.

Depuis le début des inondations historiques qui ravagent le pays depuis trois mois, la première ministre a été beaucoup critiquée pour ses annonces contradictoires et la sensation de flottement qui transparaît parfois de son gouvernement.

«J'en ai gros sur le coeur de voir la population souffrir, alors que je dois me coordonner avec tellement de gens pour travailler, c'est stressant», a réagi la chef du gouvernement, qui est apparue plusieurs fois ces dernières semaines désemparée, marquée physiquement, parfois les larmes aux yeux.

«De toute façon, je travaillerai de mon mieux».

Le centre-ville de la mégalopole de 12 millions d'habitants garde jusqu'à présent les pieds au sec, protégé par des kilomètres de digues. Mais un cinquième de la ville, principalement dans le nord et l'ouest, est désormais sous l'eau.

«En terme de superficie, il y a environ 20% d'inondés», a indiqué jeudi son porte-parole Jate Sopitpongstorn à l'AFP.

«À Bangkok, la situation semble empirer, alors que l'eau venue du nord continue d'inonder de plus en plus de zones», a de son côté commenté le Bureau de coordination des Affaires humanitaires de l'ONU (OCHA) dans un communiqué.

Les autorités ont demandé l'évacuation totale de huit districts, sur les cinquante que compte la capitale, et l'évacuation partielle de quatre autres. Soit plus d'un million d'habitants, selon les chiffres officiels.

Mais beaucoup d'entre eux ont choisi de rester chez eux, malgré les dangers de maladies liées à la saleté de l'eau, les risques d'électrocution et les difficultés d'approvisionnement en nourriture et eau potable.

«Il y a 11 000 évacués vivant dans des centres d'hébergement temporaires à travers la ville», a indiqué le porte-parole.

Les inondations, les pires depuis des décennies, ont tué au moins 437 personnes depuis trois mois et affecté des millions d'autres, principalement dans le nord et le centre du pays.

Les autorités ont jusqu'à présent réussi à épargner le centre d'affaires et financier de Bangkok des gigantesques masses d'eau venues du nord après une mousson particulièrement abondante.

Une situation qui provoque la colère de certains habitants des quartiers les plus touchés, où l'eau peut dépasser un mètre par endroit, qui estiment avoir été sacrifiés.