Un kamikaze a tué huit personnes lundi en précipitant sa voiture bourrée d'explosifs dans la résidence d'un officier de la police antiterroriste à Karachi, dans le sud du Pakistan, pays ensanglanté par une vague très meurtrière d'attentats des talibans alliés à Al-Qaïda.

Aslam Khan, commissaire de la police criminelle chargé de démanteler les cellules terroristes, a assuré lui-même devant sa maison dévastée qu'il n'avait pas été blessé et accusé aussitôt les insurgés islamistes. «Je n'ai pas peur des talibans, laissez-moi vous dire que, maintenant, je ne vais pas les épargner», a-t-il dit.

Le kamikaze a précipité sa voiture contre le portail, gardé par l'escorte du commissaire. «La déflagration m'a jeté au bas de mon lit, c'était comme si la terre tremblait», décrit le commissaire Khan, qui s'est précipité dans les autres pièces pour constater que sa famille était indemne.

Huit personnes, dont six policiers de l'escorte du commissaire, et un enfant, qui se rendait à l'école, ont été tuées, a déclaré à l'AFP Shoukat Hussain, un policier.

L'attentat s'est produit dans un quartier résidentiel du centre de la capitale économique du Pakistan, une mégalopole peuplée de quelque 18 millions d'habitants.

«Je recevais des menaces du Mouvement des Talibans du Pakistan (TTP)», a expliqué le commissaire Aslam Khan.

Le TTP est le principal groupe de talibans qui a fait allégeance à Al-Qaïda, et responsable de la majorité de quelque 500 attentats qui ont fait près de 4700 morts dans tout le pays ces quatre dernières années.

Leur bastion, dans les zones tribales du nord-ouest, frontalières avec l'Afghanistan, sont devenues le principal sanctuaire d'Al-Qaïda dans le monde et la base arrière des talibans afghans qui combattent les forces internationales de l'autre côté de la frontière.

À l'été 2007, à l'unisson d'Oussama Ben Laden en personne, le TTP avait décrété le jihad contre Islamabad pour son soutien aux États-Unis depuis fin 2001 dans leur «guerre contre le terrorisme».

Les talibans ont également juré d'intensifier leurs attaques au Pakistan pour venger la mort de Ben Laden, tué le 2 mai dernier à Abbottabad, non loin d'Islamabad, par un commando héliporté de soldats d'élite américains.

Jeudi déjà, les insurgés islamistes avaient tué 46 personnes dans un attentat suicide lors des funérailles d'un chef d'une tribu qui avait levé une milice antitalibans à Mattani, dans le nord-ouest.

Et deux jours avant, ils avaient mitraillé un bus scolaire d'un village qui avait également créé sa milice pour les combattre, tuant quatre écoliers et leur chauffeur.

Les drones de la CIA pilonnent régulièrement les zones tribales pakistanaises en ciblant les cadres d'Al-Qaïda et des talibans afghans, notamment le réseau Haqqani, la bête noire des soldats américains en Afghanistan.

Or Washington soupçonne de plus en plus ouvertement Islamabad, pourtant son allié-clé depuis fin 2001 dans la lutte contre Al-Qaïda, de jouer double-jeu en protégeant le réseau Haqqani dans le district tribal du Waziristan du Nord, bastion du TTP.

Pour les experts, la toute puissante armée pakistanaise, notamment ses services de renseignements, espère ainsi se ménager un futur allié en Afghanistan, persuadée que les talibans vont reprendre le pouvoir une fois que les forces internationales auront quitté le pays, comme elles ont commencé à le faire dans un processus censé s'achever fin 2014.

Dimanche, la secrétaire d'État américaine Hillary Clinton a fermement réclamé au gouvernement pakistanais d'agir contre le réseau Haqqani, soupçonné d'avoir perpétré les attaques coordonnées qui ont secoué le centre de Kaboul deux jours durant les 13 et 14 septembre.