Secoué par de nouvelles violences, le Xinjiang, région du Nord-Ouest de la Chine, a vu lundi l'oeuvre de «terroristes entraînés à l'étranger» dans les attaques qui ont fait 19 morts à Kachgar ce week-end et a montré du doigt le Pakistan voisin.

Un calme inhabituel régnait lundi à Kachgar où de nombreuses boutiques étaient fermées et la présence policière avait été renforcée sans être écrasante, a constaté une journaliste de l'AFP.

Les autorités de cette ville de l'extrême Ouest du Xinjiang, région autonome abritant une forte population musulmane et turcophone, essentiellement ouïghoure, ont accusé dans un communiqué des extrémistes religieux prônant le «jihad» (guerre sainte).

Quatorze personnes ont été tuées samedi et dimanche dans cette ancienne oasis de la Route de la soie lors d'attaques à l'arme blanche menées par des Ouïghours ainsi que cinq assaillants, abattus par les forces de l'ordre, selon des sources officielles.

Lundi deux hommes soupçonnés d'être impliqués dans les violences du week-end, tous deux ouïghours, ont été «tués par la police qui s'apprêtait à les capturer» dans la banlieue de Kachgar, a annoncé le gouvernement local.

Des suspects ont expliqué après leur arrestation que le cerveau des attaques s'était entraîné au Pakistan, a affirmé la ville de Kachgar sur son site internet.

«Il était allé au Pakistan rejoindre l'Etim (Mouvement islamique du Turkistan oriental) et a été formé au maniement d'explosifs et d'armes à feu» avant de revenir au Xinjiang», indique la municipalité.

«Tous les membres de son groupe adhèrent à une idéologie religieuse extrémiste et prônent le jihad. Ils ont planifié de violentes attaques terroristes pour miner la stabilité (...) et séparer le Xinjiang de la Chine».

Le pouvoir communiste chinois, aux prises depuis des années avec une insurrection larvée au Xinjiang, accuse régulièrement des terroristes étrangers d'y fomenter des troubles -- sans fournir de preuves.

Dans les seules violences de dimanche, six civils ont été tués lorsque des assaillants ont mis le feu à un restaurant à Kachgar, indique l'agence Chine Nouvelle, rappelant que la police à tué cinq «suspects».

Les attaques à l'arme blanche de samedi, qui ont fait huit morts dans la même ville, n'ont pas été qualifiées de «terroristes», par la municipalité de Kachgar.

Sur la Place du peuple, on voyait une demi-douzaine de camions de l'armée et de nombreux soldats étaient en faction.

Des véhicules de policiers en armes bloquaient l'accès de la rue ou a eu lieu l'attaque de samedi.

Très peu de Hans (ethnie largement majoritaire en Chine) circulaient en ville. Une femme Han en voyage d'affaires a expliqué à l'AFP qu'elle «ne prendrai(t) pas de taxi car les chauffeurs sont ouïghours».

Un chauffeur ouïghour a expliqué de son côté que Kachgar était bien plus calme que d'habitude et qu'il craignait des représailles des Hans contre son ethnie. «J'ai peur de mourir», a-t-il dit.

Ces violences au Xinjiang, où vivent plus de 8 millions de Ouïghours, interviennent moins de deux semaines après des heurts qui ont fait 20 morts le 18 juillet à Hotan.

De nombreux Ouïghours dénoncent la répression culturelle et religieuse à leur encontre ainsi que l'immigration massive de Hans, qui promeuvent le développement économique de cette région reculée, mais riche en ressources naturelles.

Lundi, le quotidien nationaliste Global Times accusait lui aussi les «extrémistes de l'étranger», de même que «certains médias occidentaux», d'avoir mis de l'huile sur le feu entre Ouïghours et Hans.

«Les responsables (des attaques) étaient tous ouïghours, mais leur appartenance ethnique ne leur fournit aucune excuse qui leur permettrait d'échapper à un châtiment pour des crimes si horribles», estime le quotidien.

La capitale du Xinjiang, Urumqi, avait connu en juillet 2009 des émeutes entre Ouïghours et Hans qui avaient fait au moins 200 morts, selon des sources officielles.

Ces émeutes, les plus meurtrières en Chine depuis des décennies, avaient déclenché une implacable répression contre les Ouïghours avec des dizaines d'exécutions, de nombreuses disparitions et arrestations, aggravant encore le ressentiment de cette communauté contre le pouvoir communiste chinois.