La police indienne tentait vendredi d'avancer dans l'enquête sur le triple attentat de Bombay qui a fait 17 morts mercredi soir, en dépit de faibles indices pour démasquer les auteurs et de conditions défavorables sur le terrain.

Les enquêteurs craignaient que les pluies torrentielles qui se sont abattues ces dernières 48 heures ne fassent disparaître des indices essentiels sur les lieux des explosions, des quartiers commerçants animés dans le sud et un autre résidentiel, plus au nord de la capitale financière.

Jeudi soir, le chef de la brigade antiterroriste de l'État du Maharashtra, dont Bombay est la capitale, a reconnu que la mousson entravait les efforts de la police scientifique. «Il va leur falloir un peu plus de temps pour trouver de nouveaux éléments sur les engins explosifs», a admis Rakesh Maria.

Le travail d'équipes de l'identité judiciaire sur des débris prélevés in situ a révélé que les bombes, dissimulées dans les rues bondées, étaient composées de nitrate d'ammonium, un fertilisant fréquemment utilisé dans la fabrication d'engins explosifs artisanaux.

La police continue le fastidieux examen des enregistrements de caméras de vidéosurveillance issues des trois endroits visés à une heure d'affluence. Les enquêteurs ont commencé à passer au crible 11 CD d'enregistrement pour tenter d'identifier les auteurs.

«C'est un travail énorme», a souligné devant la presse le secrétaire d'État à l'Intérieur R.K. Singh, précisant que la police avait réussi à identifier le propriétaire d'un scooter dans lequel l'une des bombes était dissimulée.

Selon le ministre de l'Intérieur, P. Chidambaram, les responsables de l'attentat sont peut-être «un très petit groupe travaillant dans la clandestinité».

Ces remarques visaient en partie à anticiper les accusations prévisibles contre le Pakistan, le pays rival de l'Inde invariablement montré du doigt après chaque acte de terrorisme frappant le pays.

New Delhi accuse son voisin d'avoir aidé et incité des groupes islamistes à commettre des attaques sur son sol, notamment celles de novembre 2008. Un commando de dix hommes avait semé la mort à Bombay au cours d'un assaut de 60 heures, faisant 166 morts.

Mais les commentaires du ministre de l'Intérieur soulignent surtout l'absence d'informations tangibles sur l'identité des auteurs du triple attentat, comme ce fut déjà le cas lors de précédentes affaires.

L'an dernier, plusieurs explosions à la bombe, dont la dernière en date en février 2010 qui avait fait 16 morts à Pune (ouest), n'ont jamais été élucidées.

Certains attentats ont été imputés à deux groupes islamistes: celui des «Moudjahidine indiens» et le Laskhar-e-Taïba (LeT), installé au Pakistan. New Delhi a accusé ce dernier d'avoir perpétré les attentats de 2008.

Le nitrate d'ammonium a été précédemment utilisé par les «Moudjahidine indiens», qui ont déjà revendiqué plusieurs séries d'attentats meurtriers ces dernières années.

Deux membres présumés de cette organisation assez peu connue ont été arrêtés la semaine dernière à Bombay dans le cadre d'une enquête sur des attentats à Ahmedabad (ouest) en 2008 et ils étaient interrogés à propos des attentats de mercredi, a indiqué le ministère de l'Intérieur.

Mais le chef de la brigade antiterroriste de Bombay s'est gardé de toute spéculation.

Il s'est aussi montré prudent concernant des informations de presse selon lesquelles une tête coupée et un corps emmêlé de fils retrouvés sur l'un des sites visés évoquaient un attentat suicide.

«Avec la progression de l'enquête, les angles, les possibilités se réduisent et nous pourrons déterminer les responsabilités individuelles dans tout ceci. Tous les angles sont étudiés, il est trop tôt pour dire si c'est un attentat suicide», a déclaré M. Maria.

La presse indienne, elle, résumait vendredi l'état d'avancée de l'enquête par ces titres: «La police dans le brouillard» ou «Le gouvernement dans l'obscurité».