Après avoir dénoncé plus de 30 responsables officiels qui avaient acheté leur poste dans un district de l'est de la Chine, Li Fengchen a lui-même subi la purge. Fin 2009, il était condamné à la prison à vie.

Cet homme cultivant une image de lettré avait donné 320 000 yuans (35 000 euros) à son supérieur pour occuper un emploi qui, en retour, lui a permis de récolter 14 millions de yuans en pots-de-vin et commissions occultes, principalement à travers des ventes illégales de terrains.

Le Quotidien du Peuple, organe du parti communiste chinois, a érigé le cas de Li en exemple pour la corruption endémique qui sévit dans le pays et est à l'origine d'un large mécontentement populaire.

«Comme le peuple chinois a placé en nous l'ardent espoir d'une administration intègre, il est de notre devoir de nous atteler à cette mission urgente et de longue haleine», a déclaré samedi le premier ministre Wen Jiabao dans son discours d'ouverture de la session annuelle du parlement chinois.

Il a ajouté qu'il fallait «en premier lieu résoudre la question des fonctionnaires qui abusent de leur pouvoir à des fins personnelles».

La lutte contre la corruption est mentionnée chaque année comme une priorité du gouvernement chinois, mais elle revêt aujourd'hui une importance particulière alors qu'une nouvelle génération de dirigeants doit accéder au pouvoir fin 2012 et début 2013.

Prévenir la prévarication est «une question de vie ou de mort pour le parti», a déclaré He Guoqiang, principal responsable de la lutte anticorruption en Chine, dans un rapport publié avant la session parlementaire.

Mais selon les analystes, le problème est lié de façon si intime au système communiste lui-même que les dirigeants chinois sont confrontés à un travail de Sisyphe.

«La principale cause de la corruption au niveau local est une absence de contrôle sur le pouvoir politique», a déclaré à l'AFP Hu Xingdou, un économiste de l'Institut de technologie de Pékin.

«Il n'y a pas de supervision démocratique des responsables par la population locale, et même les mécanismes de contrôle interne du Parti (communiste) font défaut», explique cet expert.

«Les gouvernements locaux se supervisent eux-mêmes: il est donc naturel que la corruption empire», d'après lui.

Avoir un bon poste dans l'administration a depuis longtemps été un moyen de s'enrichir en Chine, en particulier durant les trois dernières décennies de boom économique.

Certaines affaires récentes surprennent néanmoins par les montants en jeu.

Le mois dernier, le ministre des Chemins de fer, Liu Zhijun a été limogé. Selon le Global Times, il aurait empoché pour plus de 800 millions de yuans (87 millions d'euros) de pots-de-vin liés à des contrats pour l'expansion du réseau chinois de lignes à grande vitesse.

Liu, qui est âgé de 58 ans, aurait aussi entretenu dix maîtresses, ajoute le quotidien.

Les efforts du gouvernement pour lutter contre le phénomène ne sont plus à la hauteur des tentations de plus en plus nombreuses qui s'offrent aux cadres du régime, estime Sun Yan, spécialiste de la corruption à la City University de New York.

«Parmi les principales motivations pour une prévarication de plus en plus importante, on trouve l'envoi d'un enfant dans une université d'un pays occidental, l'achat de papiers pour y émigrer ou d'un logement à l'étranger», selon M. Sun.

«D'autres motifs sont les achats et l'investissement dans l'immobilier... afin d'entretenir plusieurs maîtresses et l'achat des produits de luxe».

En décembre, Guan Jianjun, un simple chef de brigade de la police de la ville Yangquan (nord) a été arrêté pour proxénétisme et avoir organisé des jeux d'argent, a rapporté Chine nouvelle.

L'agence officielle a précisé que Guan était à la tête d'une fortune de 100 millions de yuans (près de 11 millions d'euros), possédait 29 appartements et une Rolls-Royce valant plus de 850 000 euros.