La Thaïlande et le Cambodge ont de nouveau échangé des tirs lundi, alors que le chef de l'ONU Ban Ki-moon les appelait à la retenue après plusieurs jours de combats sporadiques qui ont fait au moins six morts.

Le Premier ministre cambodgien, Hun Sen, a affirmé que les combats avaient repris lundi matin pour la quatrième journée consécutive et qu'un de ses soldats avait été tué dimanche, portant à six le nombre de morts depuis vendredi: un civil de chaque côté, un soldat thaïlandais et trois cambodgiens.

Une source militaire thaïlandaise a minimisé ces nouveaux heurts, assurant qu'il s'agissait d'un échange de tirs à l'arme légère, provoqué par un «malentendu», qui aurait duré deux minutes.

Les deux voisins s'affrontent depuis vendredi autour d'une zone frontalière contestée qui abrite le temple de Preah Vihear, datant du XIe siècle. Ils se rejettent la responsabilité des incidents, les plus violents depuis des années, accusant l'autre d'«agression» et assurant n'avoir fait que défendre leur «souveraineté».

Pour les analystes, les deux pays, qui partagent une frontière qui n'a pas été totalement délimitée, utilisent leurs différends territoriaux pour satisfaire leurs nationalistes respectifs. Mais la cause des affrontements, de la part de militaires décrits comme proches les uns des autres et plus calmes que les politiques, reste inconnue.

Dans cette guerre des mots, le Cambodge a demandé une réunion d'urgence du Conseil de sécurité de l'ONU pour faire cesser «l'agression» thaïlandaise et des Casques bleus pour maintenir une «zone tampon».

Le secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-moon a, lui, fait part de sa «profonde inquiétude» et appelé les deux parties à «exercer une retenue maximum».

Tout comme la Chine, qui les a appelés à «empêcher la situation de s'aggraver».

Le ministre indonésien des Affaires étrangères Marty Natalegawa, dont le pays préside d'Association des Nations d'Asie du Sud-Est (Asean), était lundi à Phnom Penh pour rencontrer son homologue, alors que Bangkok a jugé «inutile» l'intervention du bloc régional.

Le temple khmer, dont le classement au patrimoine mondial de l'Unesco en 2008 avait provoqué la colère des nationalistes thaïlandais, relève de la souveraineté du Cambodge, selon une décision de la Cour internationale de justice de 1962.

Mais les Thaïlandais contrôlent ses principaux accès et les deux parties revendiquent une zone de 4,6 km2 en contrebas de l'édifice qui n'a pas été délimitée.

Phnom Penh a accusé l'artillerie thaïlandaise d'avoir visé le temple, conduisant à l'effondrement d'une de ses ailes. Le porte-parole de l'armée thaïlandaise a confirmé que le temple avait été endommagé, sans pour autant reconnaître la responsabilité de son pays.

Des milliers de personnes ont dû fuir des deux côtés.

Les tensions ont été ravivées après l'arrestation fin décembre de sept Thaïlandais dans une autre zone disputée. Deux d'entre eux, dont un ex-leader du mouvement nationaliste et royaliste des «chemises"jaunes», ont été condamnés à Phnom Penh à de la prison ferme pour espionnage.

Après avoir contribué à l'arrivée au pouvoir en 2008 du Premier ministre Abhisit Vejjajiva, les «jaunes», qui ont fait chuter plusieurs gouvernements ces cinq dernières années, ont pris leurs distances à son égard et réclament désormais sa démission.

Jamais avare d'ironie, Hun Sen a appelé son homologue à ne pas utiliser «le territoire cambodgien comme des bonbons pour satisfaire les chemises jaunes».